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le Dimanche 29 août 2021 18:20 Ailleurs au Canada

Apprendre des autres et voyager, le sel de la vie d’Aurélie Marié

Apprendre des autres et voyager, le sel de la vie d’Aurélie Marié
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Aurélie Marié vit à Ottawa depuis 2017, après quatre ans à Sudbury. Elle fait partie des personnes qui racontent leur tour du monde émaillé d’anecdotes avec un bonheur palpable. Ou, comme la Française bientôt Canadienne aime à les qualifier, ses «sauts de puce du monde». Si elle a en effet visité plusieurs pays dès qu’elle en a eu le temps et l’envie, certains l’ont retenue plus longuement que d’autres en marquant un peu plus sa passion pour le partage des cultures. 

Francopresse

Le Canada est le pays où Aurélie Marié, 33 ans, aura passé le plus de temps ces dix dernières années. La directrice du marketing et des communications du Muséoparc Vanier, à Ottawa — poste créé pour elle par feu Jean Malavoy — a eu peu d’adresses fixes avant de poser ses valises au Canada. 

De ce côté de l’Atlantique, le périple d’Aurélie commence en 2012, à Ottawa, alors qu’elle effectue un stage à l’Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM) dans le cadre de ses études à l’École de commerce de Chambéry, située dans les Alpes françaises. 

En parallèle de son stage, Aurélie a pour projet de faire le tour des États-Unis en van dès qu’elle le pourra. Mais lorsque l’APCM lui explique que dans le cadre de son poste, elle sera sur la route en Ontario et au Québec le plus clair de son temps, elle fait place au rêve canadien plutôt qu’au rêve américain.

L’Afrique du Sud a marqué Aurélie par son mélange des cultures et ses paysages. Crédit: Courtoisie

«On ne peut rêver mieux en début de vingtaine! Travailler dans la musique et être sur la route avec une belle équipe, le job de rêve!», s’enthousiasme-t-elle encore dix ans plus tard, visiblement consciente de la chance qu’elle a eue. 

Cette chance, Aurélie Marié a travaillé fort pour se la créer : «J’ai passé deux ans à étudier presque tous les jours pour entrer en école de commerce.»

Née et élevée à Strasbourg, en Alsace, à l’est de la France, Aurélie veut effectuer ses études avec une idée précise en tête : ouvrir une maison d’hôtes alternative, participative et axée sur l’écologie, elle qui a la «consommation responsable» à cœur. 

Ses futurs voyages lui réservent d’autres desseins.

Pas une minute à perdre 

Choisissant de prendre une année sabbatique en 2011, Aurélie part faire un stage de cinq mois en Afrique du Sud dans un centre culturel. 

Une fois acceptée, elle a un mois devant elle avant de partir pour Cape Town, la capitale. Pas question pour l’étudiante de rester les bras ballants! 

«Quand on a un peu de temps, c’est bien de le combler en voyageant! C’était un peu le but de l’année sabbatique aussi», explique-t-elle, justifiant au passage son goût prononcé pour les voyages. «J’ai donc rejoint mes parents, qui avaient prévu de voyager en Amérique centrale. On a fait le Guatemala, le Honduras et le Salvador!» 

«Au retour, j’ai passé cinq jours dans les avions pour rentrer en France, préparer ma valise et repartir pour l’Afrique du Sud pour commencer mon stage», se rappelle Aurélie en riant. 

Parler culture(s)

Une fois à Cape Town, elle découvre la culture en milieu professionnel. Là, c’est le déclic: ce volet culturel change ses perspectives de carrière, orientées à la base vers le tourisme. Son plaisir de raconter ces quelques mois est palpable, même par écrans interposés.  

Elle confirme que l’Afrique du Sud l’a beaucoup marquée pour ses paysages, mais surtout pour son «mélange des cultures». Aurélie est alors au bon endroit pour en témoigner: le centre culturel où elle travaille a pour mission de faire rayonner l’art panafricain dans toute sa diversité. 

Son lieu de travail devient une source de rencontres et de partage de modes de vie et de langues différentes. 

L’un des nombreux voyages aux paysages merveilleux qu’Aurélie Marié a «eu la chance» de découvrir. Crédit : Courtoisie

«On l’oublie souvent, mais l’Afrique du Sud est l’un des pays qui comptent le plus de langues officielles, rappelle Aurélie. Il y en a onze en tout. Chacune représente les principales ethnies.» 

Elle évoque son équipe d’alors, qui «faisait fi de l’Apartheid, de la hiérarchie et des couleurs de peau. Il y a une grande résilience dans ce pays […] Ce n’est pas pour rien que Nelson Mandela a lutté pour mettre tout le monde sur un pied d’égalité et non pour renverser la machine», explique-t-elle, le regard sérieux.

«La majorité des gens dans le monde veulent le bien. La société occidentale est bien logée, il faut parfois arriver à prendre du recul…», ajoute-t-elle, passionnée.

Pendant sa découverte de l’Afrique du Sud, la jeune femme prend le temps de questionner les habitants du coin dès qu’elle ne comprend pas quelque chose. «J’ai fait et je fais encore ça lors de mes voyages, et ici au Canada! C’est l’intérêt quand tu pars à l’étranger: questionner, confronter les idées reçues… Sans imposer sa façon de penser, il s’agit juste de dire comment tu vois les choses, comment celle ou celui d’en face les voit et si on peut se rencontrer au milieu, tant mieux!» 

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Faire exploser les cadres préétablis

Cette soif de connaître les autres et leur manière de vivre fait partie intégrante d’Aurélie Marié. C’est l’une des multiples raisons qui la poussent à voyager autant; car la globe-trotteuse ne s’est pas arrêtée à l’Afrique du Sud. 

À son retour de stage, elle reste deux jours en France, «le temps de changer de valise». Le Danemark est sa destination suivante, pour le semestre suivant, fin 2011. Mais une confusion de l’école de commerce entraîne un retard d’inscription à l’université. 

En plus de vivre à six dans une «cabane où il n’y avait qu’un four et aucun ustensile dans la cuisine», et même si elle arrive à avoir une chambre en résidence, Aurélie juge qu’elle perd son temps, car les cours, peu nombreux, ne l’intéressent pas plus que ça. 

«J’avais un peu de temps, donc… j’ai voyagé», répète-t-elle, le sourire en coin. 

S’ensuivent donc la Pologne, la Norvège et la Thaïlande, où elle effectue ses fameux «sauts de puce» pendant plusieurs semaines. L’idée de faire sa dernière année de stage au Canada germait depuis le Danemark. 

La jeune femme affirme avoir parfois fait des «sauts de puce du monde»: les chutes d’Iguazu, à la frontière entre le Brésil et l’Argentine, en sont un exemple. Crédit: Courtoisie

Elle contacte donc les ministères de la Culture de chaque province. Son CV circule, elle suit son stage à Ottawa qui débute en janvier 2012. Avant de partir, vu qu’il lui «restait encore un peu de temps», elle voyage de l’Europe du Nord jusqu’en France pour terminer une énième valise avant de rejoindre l’APCM à Ottawa, pendant six mois. 

Elle quitte ensuite Ottawa en juin 2012 pour «apprendre l’espagnol à Buenos Aires pendant trois mois». 

Quelques escales à Mexico et au Chili plus tard, elle retourne en France pour sa dernière année d’études de commerce, en septembre 2012. 

L’Ontario, «comme en famille»

«J’ai mis quatre mois à retrouver ma place, se souvient Aurélie. J’ai vécu seule depuis un moment, en toute liberté. J’avais vu qu’il y avait de nombreuses façons de vivre et d’être heureux… Donc rentrer dans un pays occidental avec un certain nombre d’attentes et de conventions a été compliqué.» 

Alors qu’elle doit suivre un ultime stage pour le dernier semestre de sa dernière année d’études, début 2013, elle se fait alors offrir un emploi par l’APCM. Cette occasion tombe à pic, mais Aurélie refuse et choisit de se créer ses propres opportunités : «J’aurais pu remplacer mon stage par l’offre de job de l’APCM, mais j’ai préféré m’ouvrir d’autres portes et développer mon réseau professionnel.»

Décidée à revenir au Canada, elle finit ainsi par atterrir dans la ville de Québec, où elle travaille quelques mois en tant qu’agente d’artistes. Elle développe son réseau et quitte pour Montréal à la fin de son stage pour «rester centrale, entre l’Ontario et le Québec, et trouver un emploi pour étendre mon visa». 

Entretemps, elle soutient avec succès sa thèse de maîtrise française via Skype et part à Sudbury après avoir décroché un poste au Théâtre du Nouvel-Ontario (TNO), où elle travaille en développement de publics. 

Voici les différents lieux qu’Aurélie a découvert dans le monde. Crédit : Francopresse

Elle y reste quatre ans et s’attache chaque jour un peu plus à la ville. «J’aimais le monde, je me sentais comme en famille, car la communauté est très liée, fait-elle valoir. Je préfère vivre en Ontario qu’au Québec, car j’ai toujours été fascinée par le fait que deux langues et deux cultures se côtoient au même endroit». 

Un héritage de Strasbourg, sa ville natale en France, qui est à la frontière avec l’Allemagne, suppose-t-elle.

Revenue à Ottawa depuis presque quatre ans, celle qui est aujourd’hui directrice du marketing et des communications au Muséoparc Vanier n’exclut pas de repartir en Afrique du Sud un temps, ou ailleurs. 

À quelques semaines d’obtenir sa citoyenneté canadienne, Aurélie n’exclut pas non plus de rentrer en France pour s’occuper de ses parents, si besoin.

En se racontant, elle se souvient qu’un Mexicain, lors d’un voyage, lui avait demandé ce qu’elle cherchait à se prouver en voyageant autant. Aurélie, qui avait été prise de court à l’époque, pense avoir une ébauche de réponse aujourd’hui: «Je voulais me montrer que je n’avais besoin de rien ni de personne pour mener ma vie.» 

Au travers des incertitudes liées à la pandémie, certaines histoires ressortent comme autant de bouffées d’air et d’espoir. C’est notamment le cas de nombreux francophones qui ont choisi le Canada comme terre d’accueil, il y a de cela quelques mois ou des années. En voici quelques-unes partagées par Francopresse.