L’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) a lancé, ce 13 mai, un appel à se mobiliser en urgence pour sauver le Campus Saint-Jean. L’appel à l’action a été entendu d’un bout à l’autre du pays, et même au-delà de nos frontières.
Guillaume Deschênes-Thériault – Francopresse
Plus de 1500 tweets en deux jours! De l’Acadie à l’Ontario, en passant par la Louisiane et l’Ouest canadien, les messages de solidarité publiés dans les médias sociaux affluent. Ceux-ci proviennent à la fois d’organismes communautaires, d’étudiants actuels et passés du Campus ainsi que de multiples citoyens francophones et francophiles.
Bonnes nouvelles! Le Campus St-Jean joue un rôle important dans la communauté francophone de l’AB. Francophone ou francophile – c’est important pour tous. Je ne serai pas où je suis aujourd’hui sans le CSJ. #SauvonsSaintJean #frenchimmersion @melaniejoly #abpoli #canpoli https://t.co/d0mbdBqtzZ
— Sarah Fedoration (@SarahFedYEG) May 14, 2020
Par voie de communiqué, la Société nationale de l’Acadie (SNA) et ses membres offrent leur soutien à la campagne de l’ACFA.
«Nous savons à quel point toute université francophone est importante pour l’avancement et la vitalité du peuple qui l’a construite. […] Aujourd’hui, chers Franco-Albertains, chères Franco-Albertaines, l’Acadie des provinces de l’Atlantique est debout à vos côtés. Sauvons le Campus Saint-Jean»
Louise Imbeault, présidente de la Société nationale de l’Acadie.

Louise Imbeault est présidente de la Société nationale de l’Acadie.
Crédit : Courtoisie
Le sénateur indépendant du Nouveau-Brunswick, René Cormier, s’est lui aussi tourné vers les médias sociaux pour rappeler le besoin grandissant en matière de formation dans les deux langues officielles au Canada. Il estime que «le soutien aux institutions postsecondaires francophones est plus crucial que jamais».

René Cormier est sénateur indépendant du Nouveau-Brunswick. Crédit : Sénat du Canada
Plus à l’ouest, le président de la Société franco-manitobaine (SFM), Christian Monnin, souligne sur Twitter l’importance du Campus Saint-Jean pour l’Alberta, mais aussi pour l’ensemble du pays. Il invite à sauver «le Campus Saint-Jean, un atout important qui contribue grandement à la vitalité de la communauté francophone non seulement en Alberta, mais aussi au Canada.» L’établissement dessert en effet l’ensemble des provinces de l’Ouest et des Territoires et permet de former une main-d’œuvre bilingue pour cette grande région.
En Louisianne, chez nos voisins francophones du Sud, en plus du message de solidarité du chanteur cajun Zachary Richard, la plateforme Télé-Louisiane a publié sur Twitter un message de soutien à la campagne franco-albertaine. «En Louisiane, on connait bien les résultats de la limitation de l’éducation francophone : une détérioration dramatique du fait français.»
Solidaire avec mes amis Franco-Albertains. Sauvons St. Jean ! https://t.co/P4A08IDWiB
— Zachary Richard (@ZacharyOfficiel) May 13, 2020
Les organismes nationaux se mobilisent
À l’échelle nationale, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada s’active pour mobiliser son réseau pancanadien en appui à l’Alberta. En entretien avec Francopresse, le président de la FCFA, Jean Johnson, insiste sur l’importance de la mobilisation citoyenne d’un océan à l’autre pour faire valoir l’importance du Campus Saint-Jean dans une perspective pancanadienne. Il cite l’exemple de l’Université de l’Ontario français.
«On a vu la campagne de mobilisation réussie menée par l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) avec l’appui du réseau national. Ça été une mobilisation intense qui a eu des résultats positifs! J’espère que ce mouvement de citoyens et de citoyennes va continuer à se mobiliser et va embarquer dans la campagne de l’ACFA.»
Jean Johnson, président de la FCFA
La Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF) a elle aussi répondu positivement à cet appel à la mobilisation en soulignant l’importance de l’éducation en français pour renforcer les capacités des jeunes d’expression française.
Pour sa part, la PDG de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), Lynn Brouillette, appelle à «trouver des solutions durables à la crise actuelle et assurer un financement stable à plus long terme».
À ce sujet, il est pertinent de rappeler qu’avant même l’annonce des récentes compressions du gouvernement albertain, le Campus Saint-Jean indiquait faire face à un sous financement. Le gouvernement provincial ne subventionnerait que 70% des étudiants à temps plein. De plus, le financement reçu du gouvernement fédéral par le biais du Programme des langues officielles en enseignement (PLOE) n’a pas augmenté depuis 2003.
L’exemple de l’Université de l’Ontario français
En Ontario, la situation albertaine trouve un écho particulier. La communauté franco-ontarienne s’était fortement mobilisée pour sauver le projet de la création de l’Université de l’Ontario français (UOF) après l’annonce de son abandon par le gouvernement de Doug Ford en novembre 2018.
Après des mois de mobilisation citoyenne importante, les gouvernements fédéral et ontarien avaient conclu une entente pour se partager à parts égales les coûts de démarrage de l’UOF, qui accueillera sa première cohorte d’étudiants à l’automne 2021. Dans un gazouillis, l’UOF s’est d’ailleurs dite attristée de la situation actuelle en Alberta.
Dans un communiqué publié le 14 mai, l’AFO mentionne être prête à partager son expertise dans ce genre de situation avec l’ACFA. «À ce jour, la mise sur pied de l’Université de l’Ontario français a été l’un des plus grands succès politiques de l’histoire de notre communauté. Mais ce succès aurait été impossible sans la mobilisation massive, non seulement des francophones de l’Ontario, mais également de l’ensemble des francophones et des francophiles du pays. La communauté franco-albertaine a été là pour nous pendant la Résistance et nous serons là pour elle», a mentionné par écrit le président de l’AFO, Carol Jolin.
Une multiplicité de professionnels formés au Campus Saint-Jean
De son côté, le directeur général de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques (ICRML), Éric Forgues, rappelle l’argument soulevé par l’ACFA que des programmes nécessaires à la vitalité de la communauté francophone pourraient être abolis.
À ce sujet, plusieurs citoyens ont pris d’assaut les médias sociaux pour rappeler la diversité de spécialistes francophones et francophiles qui ont étudié au Campus Saint-Jean et qui contribuent aujourd’hui à la vitalité de la francophonie de l’Ouest en français, que ce soit en tant que journalistes, enseignants, fonctionnaires, juristes, pharmaciens, etc.
De plus, les programmes offerts à cet établissement francophone servent souvent de tremplin à la poursuite d’études spécialisées dans des domaines tels que la santé et le droit. L’Association des juristes d’expression française de l’Alberta (AJEFA) souligne d’ailleurs l’importance du Campus pour l’accès à la justice en français dans la province.
Plusieurs manières d’appuyer la campagne «Sauvons Saint-Jean»
L’ACFA suggère plusieurs moyens d’appuyer sa campagne. Sur son site Web, l’organisme partage un gabarit de lettre à l’intention du premier ministre et du ministre de l’Éducation supérieure de l’Alberta, à la fois pour les résidents et les non-résidents de la province. L’organisme franco-albertain invite aussi à participer à des rencontres citoyennes virtuelles et à se mobiliser sur les médias sociaux. Les mots-clics de la campagne #SauvonsSaintJean et #SaveSaintJean ont abondamment été utilisés dans les derniers jours.