Lorsque Stéphane Théoret quitte le Québec pour l’Alberta avec son épouse, Sylvie-Anne, il espère prêcher la bonne parole et partager sa passion pour l’habitation à faible empreinte écologique. Quelques années plus tard, son entreprise de services a du mal à trouver des émules de ce côté des Rocheuses.

« Nous sommes arrivés à Airdrie en 2015, fuyant le marché immobilier exorbitant de la Belle Province et la qualité médiocre du bâti ». Et il sait de quoi il parle. Dès l’âge de 18 ans, ce natif de Montréal, arpentait les chantiers aux côtés de son père.
Plus tard, il se lance dans la sécurité électronique des bâtiments, un emploi à temps plein qui lui permet de constater ces incohérences énergétiques à l’heure du réchauffement climatique.
Naïf ou utopiste, Stéphane espère proposer de nouveaux concepts au monde de la construction albertaine. « Notre philosophie entrepreneuriale, c’est d’apporter des solutions saines et vertes relayant tous les éléments de la vie, comme l’eau, l’air, le feu et la terre dans le respect de l’humanité et de l’environnement ». Une mission honorable, c’est certain !
Un « autre » monde

Installé dans la province, il ne lui a pas fallu très longtemps pour réaliser que le monde de la construction avait d’autres priorités. « Lorsque nous sommes arrivés, il fallait construire vite et cher, sans vraiment se soucier de l’environnement », souligne-t-il. Néanmoins, il suppose que les mentalités changent, très doucement.
C’est ainsi qu’il offre, grâce à son entreprise 5th Element Management, des conseils mais aussi des produits et des matériaux de construction pour une meilleure empreinte carbone. Il travaille aussi avec de nombreux intervenants du bâtiment (artisans, architectes, etc.), partout au Canada, pour trouver les meilleures solutions.
Il espère ainsi trouver d’autres solutions énergétiques viables et abordables au pays du gaz et du pétrole. Malheureusement, la législation du bâtiment ne semble pas l’accompagner dans cette démarche. « Le réchauffement climatique, la Covid19, nous sommes dans une période difficile. Les mentalités changent. Malheureusement, les normes elles, ne changent pas. »
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Des produits efficaces, des freins au développement
L’utilisation de matériaux biosourcés, issus de la biomasse d’origine animale ou végétale, comme la laine de chanvre notamment, est aujourd’hui une Arlésienne. « Cette industrie n’est pas reconnue ici, et pourtant, c’est un produit sain, plus efficace sur le long terme et finalement moins cher », explique Stéphane Théoret avec un pincement au cœur.

« En Europe, les mentalités ont changé, on se préoccupe de la santé de nos proches. Ici, aucune norme ne semble émerger pour ouvrir le marché à ces produits », explique-t-il d’un air dubitatif. En effet, il n’est pas le premier à penser que les prairies pourraient être exemplaires en la matière.
« Le marché de l’habitat écoresponsable pourrait être immense. Beaucoup d’entreprises pourraient bénéficier d’un circuit court de distribution. L’économie du chanvre est une solution dans les prairies, les terres agricoles deviendraient plus rentables. C’est un choix politique avant tout ! »

Il souligne d’ailleurs, ce qui pourrait sembler un paradoxe, que les industries pétrolifères, elles, investissent dans ces nouveaux matériaux pour rentabiliser leur industrie. « Ils ont les ingénieurs pour valider leurs choix, ce que le client individuel n’a pas, faute de normes, invitant les compagnies d’assurances à refuser une prise en charge. »
Stéphane Théoret, lui, s’en est allé avec son épouse vers les cieux de la Colombie-Britannique. « Là-bas, le marché est différent. Les populations se battent pour vivre mieux, en harmonie avec la nature. Bien sûr, je continue d’espérer à un réveil albertain, et je serais là pour le soutenir ! » En attendant, ils coulent des jours heureux dans une ferme coopérative tout en préparant leur mini-maison pour l’hiver.