Ce jeudi 28 mai, dans le cadre du mouvement Sauvons Saint-Jean qu’elle a lancé, l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) tenait sa dernière rencontre citoyenne virtuelle au sujet de l’avenir du Campus Saint-Jean (CSJ). Martin Kreiner et Pierre Asselin ont donné la parole aux participants qui, tour à tour, ont souligné l’importance du Campus à leurs yeux.

Une quinzaine de participants ont répondu au dernier appel de l’ACFA. Comme les autres, cette rencontre citoyenne virtuelle était orientée vers le sous-financement du Campus Saint-Jean, la faculté francophone de l’Université de l’Alberta, située dans le quartier de Bonnie Doon.
Sur la plateforme Zoom, la réunion débute. Martin Kreiner, membre du conseil d’administration de l’ACFA, présente le contexte. « C’est la seule institution à l’Ouest du Manitoba qui accueille les francophones provenant de l’Alberta et de toutes les provinces provenant de l’Ouest et des Territoires du Nord ainsi que de l’étranger », lit-il sur le diaporama présenté aux participants grâce au logiciel Zoom.
Un peu de contexte

Après avoir évoqué l’histoire du Campus Saint-Jean (CSJ), étroitement liée avec celle des pères Oblats qui l’ont fondé en 1908, Pierre Asselin et Martin Kreiner expliquent sa situation actuelle. « Au niveau provincial, le Campus n’est financé que pour 70 % de ses étudiants à temps plein. (…) Au niveau fédéral, le financement reçu par le Campus, le Programme des langues officielles pour l’enseignement (PLOÉ) n’a pas changé depuis sa dernière bonification, en 2003. (…) À cette situation chronique s’ajoutent de nouvelles restrictions budgétaires provinciales ».

Une fois la présentation faite, c’est au tour des participants de s’exprimer. Paul Denis, directeur du Réseau santé albertain, semble déborder par l’envie de témoigner et s’investir. « J’ai fait quand même 6 années au Campus », se souvient-il. À l’époque, il n’y avait pas autant de programmes qu’aujourd’hui alors j’avais dû passer mon baccalauréat en anglais. Si ça continue, il est probable que les élèves ne pourront pas continuer le programme qu’ils souhaitent, alors il ne faut pas laisser faire ça », affirme-t-il fièrement.
Le CSJ et l’U of A, même combat ?

Anne-José Villeneuve assistait elle aussi à cette rencontre virtuelle. La professeure en linguistique au CSJ a co-publié jeudi 21 mai une lettre ouverte, signée par 937 universitaires, dans laquelle elle plaide l’importance du Campus Saint-Jean. Ce jeudi soir, madame Villeneuve tient à exposer la qualité de l’Université de l’Alberta concernant la recherche. « Nos collègues à Sainte-Boniface (ndlr: Winnipeg, Manitoba) ne peuvent pas faire autant de recherches, faire partie de l’Université de l’Alberta est une chance ».
Dans ce bras de fer pour faire plier le gouvernement, quelle tactique adopter ? L’université de l’Alberta est-elle responsable du manque de financement de la faculté francophone ? Pour Anne-José Villeneuve, il est difficile de montrer du doigt l’U of A, qui subit elle aussi les coupes budgétaires du gouvernement provincial.
Philip Worré est du même avis. Cet employé du CSJ, s’exprimant à titre personnel, explique qu’il est parfois difficile pour des anglophones de comprendre la mobilisation autour du Campus. « Alors je prends parfois du temps pour expliquer l’importance de la communauté francophone ici en Alberta et combien il est plus coûteux d’évoluer en milieu minoritaire. Quand je prends ce temps-là, ils comprennent notre situation et nous soutiennent ».
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Le seul lieu universitaire francophone à l’Ouest du Manitoba ?
La rhétorique de l’ACFA est portée sur le fait que le Campus Saint-Jean est « la seule institution à l’Ouest du Manitoba qui accueille les francophones ». Ce propos est à nuancer. À Régina en Saskatchewan, l’Université dispose de la faculté Cité francophone universitaire offre des programmes en éducation, en sciences infirmières, et en études francophones interculturelles. Cependant, l’Association communautaire fransaskoise (ACF) estime que cette institution n’est pas aussi indépendante et les programmes sont moins conséquents que la faculté albertaine. « On ne peut pas comparer la situation de ces deux institutions. C’est comme si l’on comparait des pommes et des oranges, notamment par le fait que le Campus Saint-Jean a un Doyen tandis que la Cité francophone universitaire répond directement de l’Université de Régina et que les programmes en français y sont moindres », explique Marc Masson, analyste politique à l’ACF.