Chaque année, quelques semaines avant Noël, le CAVA revêt ses vêtements de fêtes pour offrir à tous les artistes membres qui le désirent un espace de vente. Bien sûr, le nombre d’œuvres par artiste est limité faute de place, mais l’exposition offre une vue d’ensemble de ce qui est fait localement.

Si Leslie Cortés, sa directrice générale, est très heureuse du vernissage, qui a eu lieu le jeudi 20 novembre dernier, et de la présence d’une cinquantaine de passionnés prêts à faire des emplettes tout en découvrant l’art franco-albertain, elle explique sa stratégie et les raisons de celle-ci. 

Acheter local pour 100 dollars ou moins

«L’année dernière, pour ma première exposition de miniatures, nous n’avions pas eu tant de vente que cela», dit-elle avec regret. 

Elle souligne aussi qu’au moment où le CAVA faisait son ébauche de plan stratégique, l’une des réponses au sondage effectué auprès de la communauté avait retenu toute son attention : le montant du panier moyen pour acheter de l’art. Sans en évoquer le prix, elle a vite compris qu’il n’était pas élevé. «Offrir des pièces à 100 dollars et moins était pour moi une des solutions» pour rendre l’art plus attractif. 

Cette démarche a été acceptée par de nombreux artistes qui ont adapté leurs œuvres, car certains d’entre eux «ont beaucoup plus d’expérience et de notoriété que d’autres», explique-t-elle. Elle les remercie et exprime son contentement, car ils étaient plus nombreux cette année, 28 contre 21 l’année dernière. 

D’ailleurs, cette nouvelle règle des moins de 100 dollars n’a aucunement dérangé Virginie Rainville, artiste visuelle bien connue de la francophonie, qui s’est adaptée. «C’est des œuvres que j’ai faites là [pour cette exposition], qui rentrent plus dans l’exploration artistique.» 

Exposer ces nouvelles œuvres lui permet aussi de voir «la réaction du monde». Elle avoue que certains artistes ont eu des réticences, car leurs œuvres se vendaient beaucoup plus cher, mais le plus grand nombre a trouvé la parade en présentant des œuvres sans cadre, par exemple. En effet, «à moins de 100 dollars, quand tu calcules le prix du cadre et des matériaux, tu viens de le pogner le 100 dollars!».

L’art ne fait pas partie des priorités des jeunes familles et la directrice générale de l’organisme le comprend tout à fait. «Quand tu as des enfants, tu as d’autres priorités financières.» Mais cela ne l’empêche pas d’espérer changer les choses dans les prochains mois. 

Un public à rajeunir, mais pas que…

Elle constate aussi que la clientèle se déplaçant au CAVA est formée davantage de retraités que des familles. «La clientèle est âgée» et habituée, mais plutôt que d’y voir une difficulté, la directrice générale y voit une chance de peut-être créer un lien avec les plus jeunes générations. 

Au niveau des membres, elle fait le même constat. Malgré quelques démarches pour impliquer les jeunes des écoles dans la création d’art, notamment grâce au mentorat, elle suppose et évoque comme probable cause un désintérêt peut-être général pour la création artistique. 

Ce syndrome «est plus grand que nous, petit centre d’art communautaire; c’est général» à la société, semble-t-elle dire. Comme s’il existait une concurrence déloyale entre les faiseurs d’art et «la consommation de jeux vidéo, de Netflix et autres plateformes».  

Virginie Rainville, elle, met un petit bémol à cette généralité. Elle émet l’idée qu’autant de la part du CAVA que du Regroupement francophone artistique de l’Alberta (RAFA), l’approche au niveau des collèges est moindre. «On travaille beaucoup avec les jeunes enfants, c’est le fun, mais il existe des collèges, design, arts visuels […]. Dans cette gang-là, nos jeunes, même s’ils sont francophones, c’est une période de leur vie où ils font tout en anglais, ils ne sont pas attirés par les organismes francophones.» 

Elle pense donc que c’est dans ces établissements que les organismes devraient recruter ces jeunes de 18 à 22 ans qui ont du talent pour rajeunir leurs membres. «Ça prend de jeunes adultes!» 

Lorsque la rédaction évoque par conséquent une évolution de l’art et peut-être un abandon de la perspective paysagiste très prisée en Alberta pour un art plus contemporain, elle l’accueille les bras ouverts. Mais, «force est d’admettre que ce qui se vend, ce sont les paysages de montagnes, de lacs, toutes ces affaires-là, mais il reste que d’ouvrir la porte à ces pratiques plus contemporaines, c’est aussi ouvrir la porte à la jeunesse, s’il n’y en a pas, les jeunes ne sont pas attirés à venir».