le Vendredi 26 avril 2024

Pour la deuxième année consécutive le covid-19 s’invite quotidiennement à la table des musulmans du monde entier au moment de la rupture du jeûne, el iftar. En effet, pour la grande majorité des fidèles, le mois sacré du Ramadan a débuté le 13 avril dernier. Les croyants ne doivent ni manger, ni boire du lever au coucher du soleil. C’est l’an 1442 selon le calendrier hégirien, et cette année encore, ce quatrième pilier de l’islam sera pratiqué dans un contexte pandémique contraignant.

L’esprit de fête ne sera pas au rendez-vous cette année non plus lors de ce mois béni. Pour Basma Doubaji, cheffe cuisinière à Canmore, ce Ramadan est différent des autres car loin de sa famille et de ses amis à cause de la pandémie. Cependant elle se console avec ses horaires de travail qui lui permettent d’être auprès de sa petite fille Hiba à l’heure de la rupture du jeûne.

le jeune Ridwan Reza, 4ème année appelle à la rupture du jeûne le 23 avril 2021, 11ieme jour du Ramadan. Crédit: Salima Bouyelli

«L’année dernière avec la pandémie et des horaires décalés je rompais le jeûne avec juste une datte et un peu de lait pendant mon service», se souvient la jeune maman de son repas frugal sur le pouce. Ce virus qui a dicté sa loi sur terre, Basma en a fait une force. Elle est certes loin des siens mais elle est «proche de Dieu», confie-t-elle.

Un virus qui divise

Cette année encore, la pandémie a divisé les pratiquants du jeûne. C’est particulier car en temps normal on rencontre des gens, on se rend à la mosquée pour prier, on invite la famille et les amis, la convivialité est là.

Respect des mesures sanitaires. Crédit: Salima Bouyelli

Pour Farid Aadim, papa de 39 ans et directeur commercial pour une société informatique à Calgary, «on se retrouve à faire le jeûne chez soi». D’habitude il assiste aux tarawih, ces prières du soir durant tout le Ramadan à la mosquée mais avec le COVID, «les capacités sont limitées», explique t-il. Il a commencé le jeune à l’âge de huit ans. 

Ce manque particulier qui est cette connexion avec l’autre durant ce mois sacré se fait également ressentir chez Mehdi Nekach, employé du restaurant Olly Fresco’s à Edmonton. «Je prie à la maison en famille. Au Maroc, on respectait les restrictions en stoppant les prières dans les mosquées, mais elles vont reprendre car ne pas prier dans des mosquées durant le ramadan devient stressant.»

Centre islamique Akram Jomaa de Calgary. Crédit: Salima Bouyelli

Un mois unificateur

Le mois du Ramadan est un mois de repentir, de pardon, de solidarité et de partage. Avant la pandémie, Basma et ses amis s’invitaient mutuellement pour fêter cette journée de privation autour d’un repas. Chacun apportait un plat et la fête était au rendez-vous : bourek, soupe traditionnelle et tajines décorent la table et laissent échapper comme un parfum du pays malgré l’absence de la famille. 

«On est heureux de pratiquer notre religion même s’il n’y a pas de mosquée à Canmore et je suis fière d’être dans une communauté multiculturelle qui accepte toutes les religions», affiche Basma. 

Khalil Nader est également fier de ses origines libanaises et de sa religion. Ce Caporal de la Gendarmerie Royale (CRMP) est né au Canada et a appelé à la prière le 16 avril dernier pour la rupture du jeûne, avec son uniforme. 

Caporal Nader Khalil, de la Gendarmerie Royale du Canada, appelant à la prière du maghreb pour la rupture du jeûne au Centre Islamique Akram Jomaa le 16 avril dernier à Calgary. Crédit courtoisie. Crédit: courtoisie

C’était au centre islamique Akram Jomaa de Calgary. «C’est la première fois que je faisais cela, je l’ai fait pour la communauté et avec la communauté», déclare-t-il. C’etait une façon de démontrer sa double appartenance à la fois religieuse et patriotique. «Le Canada est un pays riche de sa diversité et on peut être à la fois musulman et canadien», a t-il ajouté.

Quelles que soient les cultures, les religions, calendrier grégorien ou calendrier hégirien, la pandémie est présente, c’est une réalité, elle nous entoure bel et bien et s’invite dans notre quotidien.

Calendrier des horaires de rupture du jeûne. Crédit: Salima Bouyelli

 

Coton, flanelle, velours, coloré ou uni, l’organisme caritatif Saint-Vincent-de-Paul à Edmonton reçoit toutes sortes de ballots de tissus de la part de généreux donateurs. La marchandise est réceptionnée, triée et rangée en fonction du besoin par des bénévoles de cette même association. Parmi ces volontaires, une certaine Jeannine décide de transformer ces kilos de tissus en quelque chose de fort original et chaleureux.

Estelle Roy, petite sœur de Jeannine Roy, est une fervente admiratrice de sa sœur aînée pour ce qu’elle fait pour la communauté francophone d’Edmonton. Crédit: courtoisie.

«Je n’ai rien fait dans ce projet d’édredons, c’est Jeannine qui a tout fait» c’est ainsi que Estelle Roy rend hommage à sa grande sœur Jeannine Roy. Les deux mille édredons atteints, Estelle dit avoir décidé de contacter secrètement les médias pour mettre en lumière l’exploit de sa sœur aînée, mais en vain. La barre des trois mille atteinte, Estelle ne baisse pas les bras et décide cette fois de contacter le journal Le Franco pour parler de la performance de sa sœur.

«Nous sommes une fratrie de douze enfants, moi j’ai trois enfants et neuf petits-enfants» précise Estelle, née le 31 décembre 1947. Sa grande sœur Jeannine est née le 7 janvier 1936, a cinq enfants, douze petits enfants et quatre arrières-petits-enfants. Elles sont originaires de la Saskatchewan. Le papa est québécois et la maman est née en Saskatchewan. Retraitée de la fonction publique, Estelle réside aujourd’hui à Gatineau, mais sa sœur demeure à Edmonton.

Une reine et deux ouvrières au service de la communauté

Jeannine dans son sous-sol est prête à l’ouvrage malgré une acuité visuelle faible, mais « suffisante pour voir l’aiguille », reconnaît-elle . Crédit : courtoisie

Après avoir servi le Bed & Breakfast durant de longues années, Jeannine décide de transformer sa maison à Edmonton en aménageant le sous-sol en un véritable atelier de couture. Elle installe une table de billard, immense, robuste, recouverte d’un panneau de contreplaqué et d’un morceau de tissu.

Elle fait beaucoup de bénévolat à Saint-Vincent-de-Paul et c’est en observant une autre bénévole, aujourd’hui à la retraite, faire des édredons que Jeannine décide en 2006 de donner un peu de son temps et de son talent. Avant la pandémie, deux dames, bénévoles elles aussi, venaient chaque mercredi lui donner un coup de pouce. Telle une chaîne de production, Marie et Rose piquaient le tissu pour relier les 3 épaisseurs et Jeannine assemblait les morceaux avec sa machine à coudre. En quelques heures l’édredon, composé de deux morceaux de tissu superposés avec à l’intérieur une couche de nappe ouatée, prenait forme et prêt à faire le bonheur d’une famille dans le besoin.

Jeannine a réalisé plus de 3000 édredons pour les nécessiteux. Crédit: courtoisie

L’organisme caritatif Saint-Vincent-de-Paul redistribue ensuite aux nécessiteux et uniquement aux personnes qui ont un toit. Les personnes sans abri, elles, héritent d’un sac de couchage : «un édredon c’est lourd et encombrant, par conséquent difficile à transporter», explique Jeannine.

Les bénévoles n’ont aucun contact avec les bénéficiaires. L’organisme fournit tout le matériel nécessaire pour la réalisation et les bénévoles se mettent à l’ouvrage. Au départ, la nappe ouatée était achetée en gros rouleaux et aujourd’hui elle est remplacée par des couvre-matelas, plus chaud. Ces derniers sont placés entre les deux morceaux de tissu pour permettre une meilleure isolation contre le froid.

Plus de 3000 édredons cousus

Notre couturière comptabilise aujourd’hui 3045 édredons à son actif, pour lits tailles simple ou double. «Je mets une journée pour assembler jusqu’à deux édredons, et lorsque j’en ai vingt-cinq, je les apporte à Saint-Vincent-de-Paul», affiche fièrement madame Jeannine, sans oublier d’ajouter «je ne connais pas d’autres personnes faire ça dans la ville d’Edmonton, j’ aime ça et ça remplit mes journées».

Véhicule utilitaire de l’association caritative Saint Vincent de Paul dans la ville de Edmonton. Crédit courtoisie

Message sans signature ou quelconque indice, épinglé sur le bonnet chaleureusement tricoté par des bénévoles dans la ville de Calgary. Crédit: Salima Bouyelli

Pour Estelle, Jeannine est une personne très humble et réservée. Elle tenait absolument à saluer le travail de sa sœur, car elle juge primordial de reconnaître hautement le travail des bénévoles de façon globale avec gratitude. «J’ai voulu faire une surprise à ma sœur en contactant votre rédaction. Si on se manifeste, ce n’est pas pour se vanter, se louanger ou whatever, mais il est important de savoir ce qu’il se passe dans la communauté. C’est comme pour les artisans locaux si on n’en parle pas il sera difficile d’acheter local», révèle Estelle.

En ces temps difficiles, la ville de Calgary a aussi ses bénévoles qui tricotent des bonnets, des écharpes, des chandails puis les exposent dans des endroits publics. Ces âmes charitables anonymes accompagnent leurs créations d’un petit message, épinglé sur le produit, invitant les personnes dans le besoin à se servir.

Bonnets tricotés par des bénévoles anonymes dans la ville de Calgary, accrochés sur le grillage. Crédit: Salima Bouyelli

Le 25 septembre dernier a eu lieu l’assemblée générale annuelle (AGA) de La Coalition des femmes de l’Alberta. Mais pas seulement. C’était aussi l’occasion de décerner le titre Suzanne Lamy-Thibaudeau qui récompense chaque année une femme francophone albertaine dévouée pour la francophonie albertaine ainsi que pour les dossiers relatifs aux femmes de la communauté.

Mariama Gueye directrice de La Coalition des femmes de l’Alberta; Chantal Londji Dang, lauréate 2020 du titre Suzanne lamy-Thibaudeau ; Malaika Onganda nouvelle vice-présidente de La Coalition. Crédit: Courtoisie

Interdiction de prendre la parole sans y avoir été invité, ton autoritaire, cadence militaire, l’AGA virtuelle de La Coalition des Femmes de l’Alberta a eu lieu dans un climat strict. Au terme de celle-ci, le nom de la récipiendaire du prix Suzanne Lamy-Thibaudeau a été annoncé : Chantal Londji Dang. 

Très investie dans le développement de la communauté francophone, Chantal s’implique « beaucoup auprès des femmes d’ascendance africaine, toutes catégories confondues ». C’est par ces mots qu’elle définit son action communautaire. Elle apporte son soutien aux femmes pour les rendre autonomes, indépendantes financièrement et économiquement, elle leur apprend à ne compter que sur elles-mêmes. « Voilà ma passion depuis les 20 dernières années », ajoute-t-elle fièrement.

«Je suis humble»

Chantal Londji Dang ne s’attendait pas à se voir décerner cette récompense. « J’ai eu un appel de Ama Dogbefou, membre de La Coalition, une semaine avant l’AGA me demandant si j’acceptais le titre. J’ai dit oui bien sûr et aussitôt j’ai contacté la personne qui a donné son nom au titre pour connaitre un peu son parcours. Là, j’ai compris », raconte-t-elle. 

Il faut souligner que Chantal n’en est pas à son premier titre pour les bons et loyaux services rendus à la francophonie et aux femmes afro-canadiennes. En 2019, elle a obtenu le 1er prix Adamiatou Konaté, Leadership féminin décerné par Pont Cultural Bridge. En 2018, elle rafle le prix d’excellence Fil Fraser de la National Black Coalition of Canada (NBCC) pour ne citer que ceux-là. Tous ses efforts, ses engagements assidus et véritables et son dévouement incommensurable ont été récompensés.

« Une récompense est vraiment méritée, je suis humble », déclare Chantal. Il y a des femmes qui travaillent dans l’ombre et font des choses extraordinaires et qui ne sont pas découvertes, qu’on ne voit dans aucun livre. « Une récompense est attribuée à un leader, à une personne qui ose, qui mène le peloton » ajoute-t-elle.

En 2011, Chantal Londji Dang recevait le Prix Dulari-Prithipaul, remis par l’ACFA, pour les actions d’une personne issue de l’immigration au sein de la communauté francophone de l’Alberta. Crédit: Courtoisie

 

Elle naît au Gabon, grandit au Cameroun, une tranche de vie en France et finit par arriver au Canada en 1985 alors qu’elle est encore lycéenne. Le monde de la presse et de l’audiovisuel l’attire. Elle décroche un stage en tant que recherchiste de sujets quotidiens dans l’émission « Téléservice » sur Télé-Québec, anciennement appelé Radio-Québec. Par la suite, elle est pigiste pour TV5 et TV5 Québec. Elle devient journaliste pour Radio-Canada International et Radio-Canada. En 2002, elle crée sa propre émission « Fourre-tout » sur une radio communautaire du campus de l’Université de l’Alberta. L’émission durera jusqu’en 2019.

« C’est en 2010 qu’on a créé le prix de reconnaissance portant mon nom, dit Suzanne Lamy-Thibaudeau. Je m’y suis un peu objectée au départ car il y a beaucoup d’autres femmes qui ont travaillé, qui ont fait beaucoup. Je l’ai accepté avec beaucoup d’humilité, de fierté bien sûr, c’est un honneur, mais il faut rester humble dans ces choses-là », témoigne Suzanne, ancienne directrice de l’association.

Suzanne Lamy-Thibaudeau est à l’origine de la création de La Coalition des femmes de l’Alberta en 2001. Cette Franco-Albertaine est reconnue dans la communauté francophone d’Edmonton pour ses accomplissements et ses engagements dans plusieurs comités.

Comment le prix émis par la Coalition des femmes est-il décerné ? Tout d’abord, chacun est invité à soumettre le nom d’une femme, qui selon lui mériterait de recevoir le prix. Le récipiendaire est ensuite désigné par un comité préalablement formé par la directrice de l’association (présentement Mariama Gueye). Ce comité ne contient aucun membre de l’association, indique Leticia Nadler, la présidente. « C’est un processus transparent et démocratique », conclut-elle. 

Depuis mars 2020, la COVID-19 a imposé son lot de changements dans le système scolaire. Pour faire face à cette conjoncture, les quatre conseils scolaires de la province ont uni leurs forces pour créer un programme en ligne de la maternelle à la neuvième année. Cette entité vient se greffer à celle déjà existante au sein du Centre francophone d’enseignement à distance (CFED). 

Michel Gariépy est directeur du centre francophone d’enseignement à distance (CFED). Crédit : courtoisie

L’union fait la force. Face à la demande des parents inquiets de la propagation du virus, les quatre conseils scolaires francophones de l’Alberta ont uni leurs efforts à travers la Fédération des Conseils scolaires de l’Alberta.

« Cette décision a été prise au mois d’août, les quatre conseils scolaires ont collaboré pour développer une école en ligne de la maternelle à la neuvième année », révèle Michel Gariépy, directeur du CFED. 

À l’époque, le CFED existait déjà. Il délivrait des cours en ligne pour le deuxième cycle secondaire, de la dixième à la douzième année. Les élèves, depuis leur domicile, étudient à leur propre rythme, se connectent et ont accès aux outils pédagogiques à tout moment.

Cette année, le mandat était d’élargir l’enseignement en mode virtuel et synchrone, c’est-à-dire en temps réel, de la maternelle à la neuvième année à cause de la pandémie. Selon la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA), en septembre 2020, le CFED était la plus grosse école francophone de l’Alberta.  

Un chantier pas comme les autres   

« Cela a été tout un chantier de tout construire, dit Hélène Gendron, la directrice adjointe. On arrivait avec une situation où on allait livrer l’enseignement d’une façon assez nouvelle ». 

Malgré les expérimentations croissantes de mars à juin dernier, cela représente un véritable défi à mettre en place. Le programme d’étude au complet doit être érigé en un temps record. Mission finalement accomplie, selon le directeur du centre. « On a construit un avion, et l’avion était déjà en train de voler grâce à une équipe formidable », se félicite Michel Gariépy, le pilote de l’établissement virtuel. 

Tout l’équipage a reçu un appui pédagogique et technologique et a fait preuve d’adaptation. « Enseigner en présentiel est différent de l’enseignement en ligne. Les outils et les médias sont différents donc beaucoup d’adaptation et d’ajustements », ajoute-t-il. 

Hélène Gendron est directrice adjointe au centre francophone d’enseignement à distance. Auparavant, elle était consultante scolaire au CSCN et directrice d’école à Jasper. Crédit: Courtoisie

Les professeurs titulaires d’un brevet dans l’enseignement viennent des quatre conseils scolaires et tout le matériel technologique leur est fourni pour assurer les cours dans d’excellentes conditions. C’est au deuxième semestre que la transition s’est fait ressentir. « D’un mode de survie, on est passé à comment améliorer les choses en cherchant tout ce qu’il faut pour continuer », affirme Hélène Gendron.

Un enseignement ouvert à tous

Le CFED accepte les élèves de toute la province. Le secteur géographique n’est pas un critère de sélection même si la majorité des inscrits proviennent des Conseils Centre-Nord et FrancoSud. Cela s’explique par la densité de la population dans ces zones. 

Comme toutes les écoles publiques, il n’y a aucun frais de scolarisation. « Le CFED a toujours été un service pour les écoles francophones de l’Alberta », annonce monsieur Gariépy. La seule condition pour bénéficier de l’enseignement du CFED est d’être inscrit dans une école francophone en Alberta. 

La rentrée scolaire 2021 est encore loin et les quatre Conseils n’ont pas encore reçu leur budget pour la prochaine année scolaire. Les négociations sont déjà en cours pour conserver les cours en ligne de la maternelle à la neuvième année. Son avenir est encore incertain, soumis à l’évolution de la pandémie. 

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Savez-vous cuisiner un tajine ? Hajar Jamal Eddine, francophone de 39 ans vivant à Edmonton, a lancé en fin d’année dernière une chaîne YouTube dans laquelle elle dévoile tous les secrets de ce plat typique marocain. 

Le cordon bleu présentant un tajine, l’ustensile dans lequel elle concocte toutes ses recettes. Crédit: courtoisie.

« On a une bonne cuisine marocaine dans la famille et ma mère, paix à son âme, cuisinait très bien », dit-elle, pleine d’émotions. Cette autodidacte a tout appris de sa maman. Elle reconstitue même des recettes dont elle ignore la composition. « J’ai dû retrouver les goûts, les parfums et les arômes des épices que ma mère utilisait ».

Alors que Hajar travaillait au Qatar comme responsable des achats dans un projet de tramway, elle invitait déjà son entourage à goûter ses plats. « Les étrangers adoraient manger ma cuisine », dit-elle, pleine de fierté. À l’époque, elle ne se doutait pas qu’un jour elle ouvrirait sa propre chaîne YouTube. 

Hajar s’installe au Canada grâce à l’obtention d’une Entrée express (résidence permanente) en 2018. Après un passage chez sa sœur Hind, enseignante à Toronto, elle quitte la province ontarienne pour s’installer en juillet 2019 à Edmonton, en Alberta. Le projet culinaire Moroccan Way naît avec sa sœur comme partenaire.

La cuisine, une véritable passion

Après un blogue, un site web et une présence sur les réseaux sociaux, elle décide de « boucler la boucle » en créant sa propre chaîne YouTube. « Vu que je sais cuisiner et que c’est une véritable passion, pourquoi ne pas partager cet amour avec les gens ? », se demande-t-elle avec une envie fervente de livrer ses petits secrets culinaires. 

Sa première vidéo est sortie fin décembre 2020. Les suivantes sont dans les trois langues : anglais, arabe et français. « Le temps que je m’habitue à la neige, que je déprime un peu, je lance ma chaîne fin décembre 2020 », avoue-t-elle le visage rayonnant.

Une gastronomie marocaine mal connue des anglophones

Contrairement aux francophones, Hajar affirme avec regret que les anglophones ne connaissent pas bien la cuisine marocaine. « À Edmonton, ils ne sont pas très ouverts à la cuisine marocaine, car ils n’ont pas vraiment essayé, et il n’y a pas vraiment de restaurants marocains », constate la jeune femme. 

Elle projette de partager le savoir-faire de sa famille, à travers des recettes traditionnelles. Ainsi, les personnes pourront découvrir l’art culinaire marocain, s’enthousiasme-t-elle. 

Par exemple, Hajar souhaite partager le tajine kadra, spécialité de Fès, à base de smen et de safran comme épice dominante ou bien le tajine de courgettes et thym. « Même les Marocains les ignorent », avoue-t-elle, car ce sont des mélanges atypiques.

Ambitieuse et talentueuse, la jeune entrepreneuse se défie de régaler les papilles de ses abonnés en créant une vidéo par semaine avec sa petite touche personnelle « pour avoir des petits “twists” dans ma cuisine », révèle-t-elle les yeux pétillants.

Un groupe de jeunes femmes en train d’extraire le safran de sa fleur à Taliouine. Crédit: courtoisie.

Le safran est roi

Le tajine désigne à la fois le plat de cuisson en argile et le mets dans lequel il est mijoté. C’est un plat traditionnel d’Afrique du Nord, principalement marocain. À l’agneau, au poulet citron, ou aux pruneaux, ce plat se décline en autant de variétés que de saveurs qu’il renferme.

Mais un tajine sans safran, c’est comme une poutine sans sauce brune. Comme pour les citrons confits et les olives, Hajar se déplace en personne pour s’approvisionner en épices. Elle profite de ses voyages au Maroc pour cueillir « l’or rouge » directement chez l’agriculteur d’un village, à six cents kilomètres au sud de Casablanca. 

« Je veux m’assurer de sa bonne qualité, et c’est une épice qui a une grande importance dans ma cuisine », précise-t-elle. Le safran est appelé l’or rouge du Maroc, car c’est une épice très délicate à cueillir et donc très chère. Elle utilise aussi le curcuma, le paprika, le gingembre en poudre et le smen, un beurre fermenté à très forte odeur que sa sœur fabrique à Toronto. Le citron confit confère aux tajines un goût particulier et parfumé pour le bonheur des fines bouches.

Cliquez ici pour visiter sa chaîne

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Comme il existe des radios ou des journaux communautaires, pourquoi pas une chaîne de télévision ? C’est le défi que s’est lancé en 2017 Quentin Eboa Nda, entraînant avec lui son ami Yao Datte en créant Garnet TV. La chaîne communautaire basée à Edmonton traite de tous les sujets de la communauté francophone africaine. 

Garnet, terme anglais, signifie grenat dans la langue française. Pas seulement la couleur, mais aussi la pierre fine en joaillerie. « La chaîne est un brassage entre l’Afrique et le Canada », explique Yao Datté, responsable des relations publiques de la télévision. La couleur grenat peut aller du vert au rouge en passant par le noir, le brun ou l’orange. Un peu comme la diversité culturelle francophone que renferme le Canada, une richesse.

Albert M. Lukhanda, professeur-enseignant au Campus Saint-Jean accompagné du présentateur Yao Adjoumani Datté lors d’une émission diffusée sur Youtube en février 2021. Crédit: courtoisie

Revenons aux origines

Après des études en relations internationales et sciences politiques à Genève de 2006 à 2011, Yao Datté quitte la Suisse car il ne trouve pas de travail. Au même moment, son pays d’origine, la Côte d’Ivoire, est toujours en guerre. Il décide alors de s’installer au Québec en 2011. En 2012, il déménage en Alberta, à Calgary dans un premier temps puis en 2014 à Edmonton où il fait la connaissance de Quentin Eboa Nda, le créateur de Garnet TV.

« Quentin vient du Cameroun et m’a parlé de sa passion pour la télévision, explique Yao. Il a commencé par acheter et installer le matériel ». Dans l’équipe, il y a aussi Virginie Mbongolo, épouse de Quentin et directrice de la chaîne depuis 2017. Une fois la logistique en place, Quentin et Yao s’attellent à la deuxième phase qui consiste à développer les programmes de la chaîne.

Pour la Saint-Valentin, Virginie était présentatrice d’une émission spéciale. Crédit: Courtoisie

Pour cela, ils invitent tous les responsables d’organismes francophones à venir dans leurs émissions pour donner leur avis. En 2017, à son lancement, la chaîne est d’abord diffusée sur Youtube et Facebook. En 2018, des émissions et des retransmissions de fêtes francophones africaines sont diffusées. Depuis janvier 2019, Garnet TV est dotée de son propre site web.

Elle se veut une télévision de proximité

Une dizaine d’émissions ont été enregistrées. Les sujets abordés sont très variés, mais demeurent proches de l’actualité. On y parle de racisme systémique comme des femmes africaines au Canada ou du COVID-19. En plein Mois de l’histoire des Noirs, « nous avons déjà plusieurs émissions en ligne », annonce-t-il.

Garnet TV fait ce que les médias publics anglophones et francophones ne font pas ou peu. « Nous allons vers les personnes, il n’y a qu’une communauté qui peut parler d’elle-même. Par exemple, si on souhaite des archives de communautés francophones africaines installées en Alberta on n’ira sûrement pas voir Radio Canada, car ce n’est pas son focus », explique le responsable des relations publiques.

Virginie Mbongolo Eboa est directrice de la chaîne communautaire. Crédit : courtoisie

La chaîne se veut être un véritable livre d’histoire contenant le patrimoine des communautés africaines francophones pour les générations futures. Elle veut transmettre cet héritage aux plus jeunes pour ne pas qu’ils oublient leurs origines socioculturelles.

« Le Canada doit réaliser que toutes ces personnes-là sont des pierres précieuses dans la communauté africaine noire francophone, par conséquent des pierres précieuses pour cette province de l’Alberta. Nous sommes une valeur ajoutée, on n’est pas venu juste pour prendre, on est venu pour donner aussi », insiste Yao Datté.

Cruels besoins financiers et humains

Comme tout projet communautaire, les financements sont souvent difficiles à trouver. Sans parler des volontaires. « Les bénévoles viennent et disparaissent. Nous autres avons déjà notre travail. Je travaille au CANAF depuis janvier dernier et ce n’est pas facile de trouver du temps ».

La chaîne ne possède pas d’équipe technique pour l’appuyer et la développer, mais elle travaille avec passion. Elle se réunit chaque samedi pour faire le point ou pour enregistrer des programmes. Certaines émissions comme la Saint Valentin ont été visionnées plus de mille fois, « ce qui est encourageant », constate Yao.

Malgré cela, Yao et son équipe ont des projets plein la tête. Ils comptent bientôt inviter des spécialistes pour traiter des sujets comme le système canadien, l’entrepreneuriat ou la famille. Toujours dans un seul et même but, celui de servir la communauté africaine francophone.

Logo de la chaîne Garnet TV. Crédit: Courtoisie

Cette première en Alberta aura finalement bien lieu, mais en ligne ! La finale régionale du concours Ma thèse en 180 secondes devait se tenir le 20 mars au Campus Saint-Jean, mais l’organisation s’était heurté à la pandémie. L’événement a finalement lieu cette fin de mois d’octobre. Les participants devront expliquer leur sujet de recherche dans une vidéo de 3 minutes qui sera publiée en ligne et soumise au vote du public

« Un exercice académique, intellectuel, mental, psychologique sur tous les niveaux », décrit Houssem Ben Lazreg, finaliste en 2017 de la version anglaise du concours. Enseignant trilingue, traducteur, interprète, éditorialiste, ce doctorant d’origine tunisienne de l’Université de l’Alberta est un expert passionné des langues. Participer à cette édition en français est un défi qu’il compte relever avec succès.

Le Festival de poésie d’Edmonton 2019 où Houssem a lu ses traductions littéraires en 2019. Crédit: Courtoisie

Bâti sur le modèle anglais australien, intitulé Three minute thesis créé en 2008, le concours avait été adapté au Québec en 2012, par l’Association pour le savoir (ACFAS). Depuis, près de 1500 chercheurs doctorants passionnés, issus de pays francophones y ont participé.

Sathya Rao, professeur à l’Université de l’Alberta, organisateur principal du concours MT180. Crédit: Capture

Sathya Rao est le chef d’orchestre de cette première version franco-albertaine. Professeur associé au département des langues vivantes et des études culturelles de l’Université de l’Alberta, il a travaillé en étroite collaboration avec l’ACFAS, de l’élaboration de la page web jusqu’au recrutement des candidats.

Élène Haave Audet en randonnée au parc Blackfoot à l’extérieur d’Edmonton. Crédit: Courtoisie

Parmi eux, Élène Haave Audet, une brillante étudiante de 24 ans en maîtrise de science biologique à l’Université de l’Alberta. Pour cette amoureuse des mésanges, il s’agit d’une occasion de partager ses recherches avec un grand public, de rencontrer d’autres chercheurs et d’autres scientifiques.

À travers sa prestation, elle espère engager le public, créer une histoire avec laquelle les gens peuvent reconnaître un aspect de leur vie normale. Elle mise sur la vulgarisation. « Par exemple, moi j’étudie les oiseaux donc j’ai trouvé un lien entre la vie d’un oiseau et la vie d’un humain pour que ce soit intéressant et unique ».

De multiples défis

D’habitude, les participants sont évalués en présentiel sur une scène par un jury de 3 à 5 personnes. Cette année, ils devront enregistrer une vidéo de trois minutes de leur performance. Une fois diffusées en ligne, le public devra voter pour l’une d’entre elles. Le vainqueur se verra attribuer une petite somme d’argent considérable financée par divers organismes francophones.

Le principal défi de ce concours, c’est le temps imparti à chaque candidat. « Parler de nos recherches en seulement 3 min, ce n’est vraiment pas long pour parler de toute une thèse ou une maîtrise à des personnes qui n’ont aucune idée des études de langage dont on se sert pour décrire notre recherche avec d’autres scientifiques », assure-t-elle.

Houssem Ben Lazreg lors de sa participation au Three Minute Thesis (3MT), la version anglaise en 2017 de Ma thèse en 180 secondes. Crédit: Courtoisie

Fort de son expérience dans la version anglophone, Houssem Ben Lazreg livre ses conseils. « Il faut donner l’idée générale et poser la problématique, les méthodes pour traiter ou aborder les sujets et à la fin mettre notre contribution dans le domaine. Tout cela en trois minutes », détaille le jeune doctorant.

Promouvoir la recherche francophone en milieu minoritaire

Élène Haave Audet identifiant les oiseaux pour sa recherche au jardin botanique de l’Université de l’Alberta. Crédit: Courtoisie

Pour Houssem partager sa recherche est synonyme de « collaborations ». C’est ouvrir un pont de communication avec des collègues francophones et partager avec le public francophone, ou pas, les recherches scientifiques. Il souhaite « favoriser l’acquisition d’une certaine culture scientifique pour enrichir sur le long terme le débat public sur les différents enjeux politiques sociaux et culturels qui impactent nos sociétés ».

Élène Haave Audet est séduite par l’aspect francophone de ce concours. « C’est une opportunité de partager ma recherche en français et de rendre hommage à mon identité francophone », affirme-t-elle.

Cette compétition se tient également pour la première fois en Saskatchewan et au Manitoba démontrant ainsi cette volonté de l’ACFAS d’élargir la visibilité des francophonies en contexte minoritaire. « C’est pour qu’on puisse parler de la recherche en français dans une conjoncture où les choses ne sont pas forcément faciles pour l’université pour la francophonie. Il y a un désir de montrer qu’on peut faire des recherches en français ici dans l’Ouest, en Alberta en particulier », commente Sathya Rao.

Voici les quatre candidats franco-albertain :

Claudia Holody

Timothy Van den Brink

Elène Haave-Audet

Houssemm Ben Lazreg

Tous les ménages aujourd’hui possèdent au moins un gadget électronique chez eux. Que ce soit un ordinateur, une tablette, en passant par le téléphone mobile, ces appareils ont une durée de vie limitée. ERA, une organisation à but non lucratif, s’est donnée pour mission de les réparer pour les redistribuer. Difficile à assumer en période de rentrée scolaire !

Pour l’association, l’environnement est une priorité. C’est pourquoi elle opte pour la règle des 3 R : réduction, réutilisation et recyclage. La principale activité de l’organisme est celle de remettre à niveau des appareils qui peuvent encore être réparés.

La société ERA, Electronic Recycling Association (ou Association de Recyclage Électronique) est une organisation à but non lucratif dont le siège social est basé à Calgary. Elle existe depuis 2004 et est implantée dans les grandes villes du Canada comme Vancouver, Edmonton, Saskatoon ou Toronto. « On fait de la collecte d’appareils électroniques chez les entreprises pour les aider dans la gestion des équipements », explique Sarah-Ann Gagnon, coordinatrice des donations depuis un an et demi.

Sarah-Ann Gagnon, coordinatrice des donations. Crédit: Salima Bouyelli

L’engagement bilingue de l’association, mais aussi « l’envie de redonner » ont motivé la Québécoise à quitter sa province pour s’installer en Alberta et élargir ainsi le réseau du Québec où la fondation y est installée depuis 3 ans.

Grande pénurie lors des rentrées scolaires

Un des principaux programmes de l’organisme aujourd’hui est le prêt d’ordinateurs portables. Il consiste à aider les familles et les étudiants durant la pandémie. « On a donné plus de 300 ordinateurs portables en juillet 2020, mais les donations se font sur toute l’année. Les organismes peuvent en faire la demande via notre site web » précise Sarah-Ann Gagnon.

L’entrepôt de Calgary déborde d’appareils électroniques. Crédit: courtoisie

Le grand besoin se fait ressentir surtout au moment des rentrées scolaires. « On recherche des ordinateurs portables et des cellulaires, car c’est pratique. Beaucoup de familles ont encore peu accès à ces appareils-là », lance Sarah-Ann en interpellant les particuliers et les entreprises à se débarrasser de leur matériel technologique qui sommeille dans les tiroirs.

Ce camion collecte le matériel technologique usagé. Crédit: courtoisie

La collecte et la réparation du matériel sont faites de façon très sécuritaire à l’aide d’une déchiqueteuse à disque dur et d’un logiciel. « Il y a deux entrepôts à Calgary. On utilise Blancco, un logiciel très réputé, pour effacer toutes les données contenues à l’intérieur des appareils », rassure Sarah-Ann.

Quelques dessins du concours organisé par ERA pour les classes de primaire. Crédit: Salima Bouyelli

Des programmes à visées caritative et éducative

Parfois, l’association reçoit des produits en parfait état de fonctionnement qu’elle redistribue à d’autres organismes caritatifs comme des écoles ou des groupes communautaires. « On priorise les organismes pour s’assurer que ça va aux personnes dans le besoin », précise la coordinatrice.

L’association organise aussi un concours de dessin autour du thème du recyclage et de l’environnement pour les élèves de primaire. Les vainqueurs remportent des ordinateurs. Quant aux plus grands, on leur demande de préparer leur événement de collecte de matériel informatique avec leur école ou leur entourage avec à la clé une bourse pouvant atteindre 10 000 $.

Du bénévolat en échange d’un ordinateur

Pour acquérir une expérience, l’association propose un programme de volontariat et le bénévole repartira avec un ordinateur une fois sa mission accomplie. Enfin, les jeunes ont l’opportunité de développer leurs compétences informatiques grâce à un programme dirigé par un professeur spécialisé.

Il n’est pas nécessaire d’avoir des compétences en informatique pour intégrer la fondation : « Je ne sais pas réparer les ordinateurs, je n’ai pas d’études spécifiques en technologie, mais on apprend beaucoup le boulot sur le tas », avoue la coordinatrice Sarah-Ann Gagnon.