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Pour Nathalie Belkhiter, enthousiasme et défis sont au rendez-vous pour l’ouverture de LumiKids, une première garderie bilingue à Red Deer. Photo : Courtoisie
L’ouverture officielle se prépare activement, avec une journée portes ouvertes prévue le 6 septembre. C’est donc dire qu’en cette fin d’été, Nathalie Belkhiter, la directrice de l’ACFA régionale de Red Deer et la gestionnaire de la nouvelle garderie, est loin de chômer.
Il aura fallu moins d’un an pour que le projet aboutisse. L’an dernier, l’ACFA régionale sous-louait des locaux à une garderie privée. La responsable d’alors décidant de partir, une réflexion s’est rapidement amorcée au sein de l’ACFA régionale afin de savoir «ce qu’on allait faire de ces locaux», se rappelle Mme Belkhiter.
Face à ce départ, l’équipe a choisi de bâtir un projet entièrement nouveau. «Il a fallu vraiment tout recréer de A à Z : penser au nom, penser au programme de la garderie en lui-même, etc.», précise-t-elle.

Vingt-cinq mille dollars de rénovations ont été nécessaires pour aménager une garderie qui accueillera 20 enfants âgés de 12 mois à 5 ans. Photo : Courtoisie

Mireille Péloquin, directrice générale de la Fédération des parents francophones de l’Alberta souhaite bonne chance à LumiKids, tout en trouvant «décevant» d’avoir une garderie bilingue à Red Deer. Photo : Courtoisie
Pourquoi une garderie bilingue?
L’ancienne garderie fonctionnait exclusivement en français. Selon Nathalie Belkhiter, l’analyse des besoins de la communauté a mené à un virage important. «La question s’est posée de savoir si on allait faire une garderie francophone ou une garderie bilingue. J’ai beaucoup écouté les parents et les membres de la communauté. Ce qui revenait souvent, c’est qu’il y avait beaucoup de couples exogames. Il fallait choisir entre le français ou l’anglais et l’un des deux parents se retrouvait lésé», analyse la directrice.
Bien qu’on sente, en discutant avec Mme Belkhiter, que le choix a été un tantinet cornélien, l’idée du bilinguisme n’est pas un choix unilatéral, mais au contraire une décision communautaire collégiale. «Il fallait répondre à un besoin criant, être inclusif.»
Tout le monde n’est cependant pas de cet avis. La directrice générale de la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA), Mireille Péloquin, trouve «déplorable» la décision qui a été prise par l’ACFA régionale de Red Deer en dépit des discussions avec Mme Belkhiter.
Elle aurait aimé qu’on tienne compte des différentes études – comme le rapport Leblanc-Power au Nouveau-Brunswick – qui démontrent que les garderies bilingues deviennent en réalité des garderies anglophones. «L’anglais est tellement dominant», laisse tomber Mme Péloquin. «Est-ce qu’on a besoin d’apprendre l’anglais à nos francophones?», questionne la directrice générale, affirmant d’emblée que les enfants franco-albertains sortent bilingues à la fin de leur secondaire.
Un autre son de cloche émane de Michael Tryon. Le directeur général de la branche albertaine de Canadian Parents for French, estime au contraire que «c’est une bonne opportunité» pour les parents de Red Deer d’avoir une garderie bilingue. Tout en étant déjà au courant des arguments de la FPFA, il est d’avis que la réalité à Red Deer montre plutôt que de nombreuses familles ont des parents francophones et anglophones, d’où la nécessité d’une garderie bilingue.
Lisa Rhindress est une jeune maman. Elle et son mari ont inscrit leur jeune fils à LumiKids. Ils viennent de l’Ontario. Tous les deux sont allés à une école francophone, de la maternelle à la douzième année. «J’ai choisi une garderie bilingue pour mon fils parce que ça peut lui ouvrir tellement plus de portes pour son futur. Je trouve qu’il est plus difficile de trouver des garderies ou des écoles françaises en Alberta parce qu’il n’y a pas beaucoup de choix.»
Se disant moins à l’aise qu’avant en français, elle est d’avis que LumiKids est une réelle chance pour son fils. «En cherchant des garderies, j’ai trouvé celle-ci et j’étais tellement excitée de pouvoir offrir cette opportunité à mon fils! Cela me pousse aussi à parler plus en français et je pense que c’est plus facile de l’apprendre à un jeune âge!»

Lisa Rhindress et son fils Myles. Photo : Courtoisie
Une capacité doublée et un fonctionnement original
La nouvelle garderie pourra accueillir 20 enfants âgés de 12 mois à 5 ans, avec un service de garde avant et après la classe jusqu’à l’âge de 12 ans. «Avant, il y avait à peine entre 5 et 9 enfants. Aujourd’hui, nous voulons maximiser notre capacité et répondre à la demande.»
Le programme pédagogique repose sur une alternance claire des langues. «On a décidé de faire lundi, mardi, mercredi en français, puis jeudi et vendredi en anglais. Pour nous, ce qui importe vraiment, c’est que l’enfant anglophone se sente inclus et qu’il puisse petit à petit découvrir et aimer le français.»
Dans ce nouveau service de garde, il est clair, pour Nathalie Belkhiter, qu’il sera important d’instaurer un milieu où des ponts seront tissés entre les diverses communautés culturelles, ainsi que des organismes déjà existants, comme la Coalition des femmes de l’Alberta qui est intéressée par le projet. Des activités familiales pourront aussi être organisées à l’extérieur des heures de garderie, avec le soutien de celle-ci.

Le directeur général de CPF Alberta, Michael Tryon, estime que c’est un plus pour la communauté de Red Deer d’avoir une garderie bilingue. Photo : Courtoisie
Les défis à relever
Si les rénovations ont déjà nécessité un investissement de 25 000$, le véritable défi reste le recrutement d’une directrice de niveau 3, comme l’exige la réglementation albertaine. «Moi, je ne peux pas ouvrir mes portes si je n’ai pas de niveau 3. C’est vraiment un défi. Il faut que ce soit bilingue et ce n’est pas facile», reconnaît Mme Belkhiter.
Celle-ci se dit toutefois encouragée par les récentes mesures gouvernementales. «Il y a eu un récent communiqué qui annonçait que le gouvernement albertain va offrir des bourses pour les personnes qui souhaitent atteindre le niveau 2 ou le niveau 3. C’est une super nouvelle.» Avis à celles et à ceux qui souhaiteraient postuler auprès de Mme Belkhiter!
Malgré les obstacles, l’enthousiasme est palpable du côté de la dirigeante. «Je crois beaucoup, beaucoup en ce projet. J’ai du soutien, notamment de la part des écoles d’immersion et de l’organisme Canadian Parents for French.»
Les parents intéressés pourront visiter les locaux lors des portes ouvertes du 6 septembre. «Il y a déjà cinq préinscriptions, mais il reste encore de la place. Les familles peuvent contacter l’ACFA de Red Deer ou directement LumiKids.»
Pour Nathalie Belkhiter, ce projet dépasse la simple ouverture d’une garderie. «Dans la francophonie, on doit montrer l’exemple de l’inclusivité. C’est ce qu’on veut faire avec LumiKids : offrir un espace où chaque enfant, chaque famille trouve sa place.»