La visite des lieux permet de plonger dans l’histoire captivante des pionniers qui se sont établis dans la province au cours du dernier siècle et de découvrir les traditions, la culture et l’art qui ont façonné leur héritage. Le thème de l’exposition, «Change and Continuity», évoque d’ailleurs le désir du conservateur de musée, Greg Borowetz, de valoriser la tradition à travers le changement.
«Notre but, c’est de garder la culture en vie, car c’est ce qui nous définit comme peuple, même s’il y a des gens qui essayent de l’éliminer au moment même où je parle», laisse entendre la présidente du musée, Elaine V. Harasymiw. C’est le seul moment où elle fera référence à l’invasion russe qui sévit en Ukraine depuis février 2022.
Joviale et chaleureuse, Elaine explique aussitôt comment le mandat du musée revêt une signification personnelle et familiale pour elle. Dans les années 1940, sa mère, en collaboration avec la Ukrainian Women’s Association of Canada, a entrepris de parcourir des régions rurales de l’Alberta et de la Colombie-Britannique pour convaincre de nouveaux arrivants ukrainiens de faire don au musée de certains items devenus désuets.
À cette époque, rappelle Elaine, une vague d’immigrants arrive en masse d’Europe après la fin de la Seconde Guerre mondiale. «Plusieurs Ukrainiens ont choisi de s’établir en Alberta en raison des terres agricoles», précise-t-elle. Aujourd’hui, la province compte au moins 400 000 habitants d’origine ukrainienne, dont près du tiers sont établis à Edmonton.
Grâce aux dons récoltés par Elaine et sa mère au fil du temps, le musée a été en mesure de constituer une riche collection d’artefacts. En outre, la fierté la plus récente de la présidente est sans contredit la cure de jeunesse qu’a subie le musée au cours des deux dernières années et qui permet maintenant à tous ces objets d’être mis en valeur dans un espace moderne et épuré. Les rénovations ont été financées par le Fonds du Canada pour les espaces culturels.
Fraîchement réouvert en juin 2023, le musée offre maintenant aux visiteurs une expérience renouvelée, explique Elaine. «On a optimisé le rangement, déplacé plusieurs choses au sous-sol pour que ce soit plus agréable et attrayant pour le public», énumère-t-elle avec enthousiasme.
Pleins feux sur les traditions ukrainiennes
L’exposition actuelle met principalement en valeur des vêtements traditionnels ukrainiens, tels que des chemises à broderie artisanale appelées vychyvanka. Ces chemises ancestrales sont ornées de motifs géométriques, floraux et animaliers et ont été méticuleusement confectionnées à la main.
«Dans ce temps-là, toutes les broderies étaient faites à la main, c’était des pièces uniques. Quand on y pense, on réalise à quel point on a perdu certains savoir-faire, maintenant que tout est fait à la machine», explique Elaine V. Harasym, avec une pointe de regret dans la voix.
Elle souligne que ces vêtements brodés sont considérés comme un bien culturel national en Ukraine et qu’ils permettent de démontrer le patriotisme des Ukrainiens envers leur terre natale. D’ailleurs, la tradition de la vychyvanka (des motifs de broderie traditionnels slaves orientaux) est si ancrée qu’elle est encore célébrée chaque année en Ukraine, et ailleurs sur le globe, le troisième jeudi du mois de mai. Pour cette occasion, la population à l’habitude de se vêtir d’une chemise à broderies pour célébrer sa culture et son héritage.
Une autre section importante du musée abrite une collection de tapisseries murales. Lors de la visite, Elaine s’interrompt un instant et désigne du doigt ce qu’elle appelle un kilim (kylym en ukrainien), une décoration qui se trouve dans de nombreux foyers ukrainiens et dont l’origine remonterait à près d’un millénaire. Elle explique, un sourire en coin, que son musée «n’a peut-être pas les kilims les plus anciens sur terre, mais que certains datent quand même d’il y a quelques siècles».
Plus tard, le regard de la présidente du musée est attiré vers un mur périphérique où sont exposées plusieurs tapisseries de plus petites tailles. «On appelle ces tapisseries rouchnik. Elles sont souvent utilisées lors des services religieux, des cérémonies de mariage et d’enterrement», évoque la présidente avec intérêt. En outre, dans les foyers ukrainiens, les portraits de famille sont souvent encadrés par un rouchnik (rushnyk en ukrainien) pour protéger la famille et la maison. «Bref, encore à ce jour, le rouchnik est une partie intégrante de notre culture», conclut Elaine.
Dans l’ensemble, la visite du musée offre une expérience immersive et diversifiée, qui met en valeur la multitude d’artefacts exposés. Des sculptures aux céramiques, en passant par les jouets, les bijoux et les peintures, les murs et les vitrines regorgent d’une abondance d’objets fascinants. Cette explosion de couleurs et de textures ne manquera pas de captiver les visiteurs dès qu’ils franchiront les portes du musée et de remplir leur tête de nouvelles connaissances!
La branche albertaine du Musée ukrainien du Canada accueille gratuitement les visiteurs du lundi au vendredi, de 9h30 à 16h30. Les groupes scolaires sont également les bienvenus, à condition d’avoir effectué une réservation au préalable.
Glossaire – Désuet : Qui n’est plus en usage