le Mercredi 13 novembre 2024
le Jeudi 21 décembre 2023 17:00 Arts et culture

Poissonnier, de l’art de la pêche à l’art de la table

Ce congre a donné du fil à retordre à Lucas lorsqu'il s'agissait de le préparer. Photo : Courtoisie
Ce congre a donné du fil à retordre à Lucas lorsqu'il s'agissait de le préparer. Photo : Courtoisie
Bonjour, moi, c'est Lucas! Arrivé de France, j’ai débarqué au pays du bœuf avec, dans mes valises, la passion du poisson. De quoi faire rire même mes compatriotes! Mais oui, je suis un poissonnier fier de l’être. Le poisson est pour moi le fil conducteur de ma vie et je suis très heureux de vous en partager quelques brèves.
Poissonnier, de l’art de la pêche à l’art de la table
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Depuis tout jeune, Lucas a toujours aimé traquer le brochet, carnassier emblématique des rivières. Photo : Courtoisie

Tout a commencé alors que je ne savais pas encore marcher. J’avais neuf mois lorsque mon grand-père me collait déjà une canne à pêche dans les mains. J’ai appris à mouliner avant même de savoir me tenir debout et je crois que c’est exactement ce qu’il voulait. 

Passionné lui aussi, il a parcouru le monde entier pour pêcher. Du Japon à Bali en passant par l’Afrique du Sud, il emportait ses cannes avec un seul objectif : la pêche miraculeuse, le plus gros poisson possible. 

Il a même emporté ses cannes pendant son voyage de noces avec ma grand-mère, c’est vous dire!

Mon papa, lui aussi, me racontait ses histoires de pêche vécues avec son propre père et ses copains lorsqu’ils passaient leurs journées au bord de l’eau. Vous l’aurez donc compris, je ne pouvais pas échapper à cette fabuleuse passion familiale.

L’étal était dans le temps un lieu où l’on installait les marchandises pour les vendre, mais c’est aussi une table de découpe sur les navires morutiers.

Acquérir une expertise 

J’ai donc passé mon enfance en France, au bord de l’eau. Proche des petits ruisseaux pour attraper les plus petits goujons ou à l’orée des grands étangs, chez moi, dans l’Aube, à la recherche du brochet, ce poisson carnassier emblématique.

«De fils en moulinets», ma curiosité s’est accentuée. Mon désir d’observer les poissons et de mieux les comprendre est devenu si présent que j’ai décidé d’en faire mon métier. Je me suis donc lancé dans des études en aquaculture. 

Je voulais maintenant savoir comment élever l’animal, de l’œuf à l’âge adulte. Me voilà donc immergé deux ans dans un monde entouré d’experts et de passionnés de poissons, de pêche et d’aquarium. De l’élevage à l’observation en milieu naturel, j’étais comblé. 

Le rêve pour moi et le cauchemar pour mes parents. 

La maison s’est remplie d’aquariums, dans ma chambre d’abord… puis dans le salon et même jusque dans la salle de bain! Il y en avait partout et je ne parlais que de ça. Pour tout dire, j’ai même passé mes diplômes de plongée. Une immersion dans cet environnement si calme où le poisson est maître.

Lucas Wagner : «Je saisis chaque occasion pour découvrir un nouveau poisson, apprendre à le préparer comme il se doit.» Photo : Courtoisie

De la ligne à l’étal

C’est bien «sympa» toutes ces histoires, mais comment suis-je passé d’un mordu de pêche au métier de poissonnier, me direz-vous?  

Et bien, voilà, grâce à toutes ces péripéties, j’ai rencontré mon ami Fred, aujourd’hui disparu. C’était un pêcheur professionnel en eau douce. Il m’a laissé découvrir son univers, sa vision de la pêche, du milieu naturel dans lequel il vivait. Cette découverte a été pour moi une aventure primitive et philosophique sur le respect de la ressource et de son environnement.

Pêcher pour déguster de façon raisonnée!

Après avoir relevé les lignes et les filets, nous restions coincés de longues heures dans une grange, avec mon acolyte, à découper, à préparer et finalement à proposer nos produits bruts à ceux qui les transformaient en mets délicieux. Une expérience qui a révélé ce désir d’être poissonnier. Ma gourmandise et mes valeurs de partage ont fait le reste… 

Me voilà donc poissonnier, passionné et curieux!

Qu’ils soient communs ou exotiques, beaux ou… plutôt laids, petits ou gros, aucun n’est laissé de côté, et surtout pas le thons blanc. Photo : Courtoisie

Loin des clichés colériques d’Ordralfabétix, le Gaulois de la fameuse bande dessinée de Robert Goscinny et Albert Uderzo, mon métier me fascine et je saisis chaque occasion pour découvrir un nouveau poisson, apprendre à le préparer comme il se doit et à le cuisiner, pour finalement partager la meilleure recette possible avec ma clientèle. Qu’ils soient communs ou exotiques, beaux ou… plutôt laids, petits ou gros, aucun n’est laissé de côté.  

Pendant trois ans, j’ai évolué en tant que responsable de poissonnerie avec une totale liberté. Achats, réceptions, préparation et transformation; chaque jour était différent. Je n’ai eu aucune gêne à offrir à ma clientèle des espèces qu’elle n’avait peut-être jamais vues, du poisson perroquet au mahi-mahi, sans oublier la raie, le grenadier ou le thon entier, et bien d’autres.

La fameuse recette de rôti de lotte au chorizo avant cuisson. Photo : Courtoisie

Rôti de lotte au lard et au chorizo.

Ingredients :

Pour 4 personnes 

  • 2 morceaux de lotte de même taille environ 400g chacun 
  • 12 tranches de Chorizo ou pepperoni 
  • 6 tranches de lard ou bacon
  • Sel et poivre 

Et de la ficelle alimentaire pour la cuisson du poisson. 

Préparation :

  • Poser à plat le premier morceau de lotte afin d’y disposer dessus 8 tranches de chorizo. 
  • Déposer le deuxième morceau de lotte sur le haut afin de refermer le rôti comme un sandwich. 
  • Entourer le rôti le long de la tranche avec le lard, le plus serré possible sans déchirer ces dernières. 
  • Avec la ficelles, entouré le rôti dans le même sens que le lard, serrer afin de maintenir le poisson en place et boucler avec un premier noeud et coupé la ficelle.
  • Ajouter le reste des tranches de chorizo sur le dessus du rôti. 
  • En commençant par une extrémité, passer la ficelle sous le rôti et joindre les deux bout sur le dessus, serrer pour bien fermer, nouer et couper. 
  • Répéter cette opération sur toute la longueur du rôti avec un espacement de 1cm entre chaque tour. 

Astuce : Nouer les deux extrémités en premier afin de maintenir l’ensemble et pouvoir bien serrer par la suite

La raie, un poisson trés combattif et excellent dans l’assiette. Photo : Courtoisie

Et dans l’assiette

J’ai pu élaborer de nouvelles recettes telles qu’une bonne poêlée de cabillaud à la pomme et au fenouil, un saumon gravlax aux agrumes pendant l’hiver avec les oranges et les clémentines de saison ou encore ma favorite, qui m’a valu l’approbation de toute ma famille à Noël, le rôti de lotte au lard et au chorizo! Surtout beau-papa! Un remède aux anti-poissons, c’est promis!

Je tiens à rassurer aussi tous les férus de fruits de mer, je suis tout aussi gourmand que vous l’êtes. J’adore déguster un bon crabe ou un bon homard. Rien de tel qu’un plat de moules frites à la maison en famille ou la célèbre douzaine d’huîtres à Noël!

Ce que j’aime avec le poisson, c’est que peu importe le niveau de cuisine que vous avez ou l’envie du jour, il y a toujours du choix! Il y a toujours quelque chose à faire et ça s’adapte partout et à tout le monde! 

J’ai commencé mon métier en France avec des produits européens. Aujourd’hui, je travaille à Calgary chez Boyd’s Lobster Shop. Je continue à apprendre et à partager ma passion et mon savoir-faire dans cette culture tout à fait nouvelle et différente.

Et même si Calgary est loin de l’océan, il est tout à fait possible d’y trouver de magnifiques poissons frais et savoureux! De plus, grâce à ce voyage en Alberta, j’ai ajouté de nouvelles cordes à mon arc et je peux maintenant vous conseiller sur de nouveaux produits tels que le homard canadien, grillé au beurre persillé, et les variétés d’huîtres qui s’agrippent sur les côtes pacifiques et atlantiques de ce beau pays.

Alors, n’hésitez pas à me rendre visite pour une belle découverte. 

Glossaire – Colérique : Qui manifeste un tempérament impulsif porté par la colère