IJL – Réseau.Presse – Le Franco
Lucie Sandrine Ebode et ses cinq enfants ont quitté le Cameroun en novembre 2022 pour s’installer à Calgary. Quelques semaines plus tard, la mère de famille a été approchée par le PIA pour participer au programme de parentalité interculturelle. Elle raconte que cette expérience lui en a appris davantage sur les «savoir-faire» parentaux du Canada et lui a permis d’échanger avec d’autres immigrants sur la manière dont ils éduquent leurs enfants.
«On m’a donné des trucs pour mieux gérer mes quatre adolescents, explique la mère de famille. Il a aussi été question de trouver un juste milieu pour pouvoir célébrer notre identité [individuelle], tout en prenant en compte la culture canadienne», évoque-t-elle.
Marco López, qui est le facilitateur du programme de parentalité interculturelle pour le CIWA et coanimateur de cette série d’ateliers avec le PIA, rappelle souvent à ses clients qu’ils doivent tisser des liens entre leur culture et celle du Canada pour trouver un «juste milieu où ils se sentent confortables». «Le but de notre programme, ce n’est pas de faire un lavage de cerveau aux parents pour qu’ils deviennent Canadiens parce que ça serait juste impossible», note-t-il avec humour.
Au contraire, les participants sont encouragés à parler leur langue (le CIWA offre des ateliers en français et en anglais, mais aussi en espagnol, en mandarin, en arabe, en hindi et en ourdou) et à partager leurs traditions avec le reste du groupe. «On veut que chaque parent conserve son identité. Le programme est facilité par un immigrant pour des immigrants après tout», ajoute le Mexicain d’origine.
Michèle Katuku, qui travaille comme agente de développement des programmes au PIA, abonde dans le même sens. «Nous cherchons à valoriser la culture de chaque parent, tout en leur permettant de se conformer tranquillement aux nouvelles normes de la société, car les façons de faire au Canada sont différentes qu’ailleurs», laisse-t-elle entendre.
Apprendre à discipliner autrement
Il y a quelques années, Michèle a d’ailleurs constaté que plusieurs parents qu’elle côtoyait dans le cadre de ses fonctions au PIA «commençaient à avoir des problèmes avec les services de protection de la jeunesse». Pinçage d’oreille et tape au visage, ces parents continuaient de punir leurs enfants en utilisant la force, une pratique encore «assez répandue» ailleurs dans le monde, mais qui n’est plus «acceptable au Canada».
Rappelons que l’article 43 du Code criminel stipule qu’un parent peut utiliser une force légère pour corriger son enfant, mais ne peut pas laisser de marque ou d’ecchymose sur son corps. Les gifles et les coups à la tête ne sont jamais permis.
En percevant l’incompréhension de certains parents face à la loi canadienne, Michèle a décidé d’approcher le CIWA en 2018 et leur proposer d’offrir leur programme de parentalité interculturelle en français. «On n’est surtout pas là pour juger les façons de faire de ces parents lorsqu’ils étaient « chez eux ». Sauf qu’ici, les choses se font différemment et ils doivent s’adapter», affirme, avec compassion, l’agente de développement des programmes.
La série d’ateliers coanimée par Marco López et Zahrat El Islam Tebbal s’amorce justement avec l’analyse des directives de l’article 43 pour mettre en garde les parents et leur «présenter des stratégies alternatives de discipline». Toutes sortes d’autres thématiques sont par la suite couvertes comme «les différents styles parentaux, les étapes du développement du cerveau, les nuances entre punition et discipline et la communication positive», conclut Marco.