IJL – RÉSEAU.PRESSE – LE FRANCO
Pour les petites communautés isolées qui sont menacées par l’exode rural et la fuite des cerveaux, l’arrivée de nouveaux résidents est porteuse d’espoir. Cependant, s’installer dans une région étrangère n’est pas facile, surtout pour les immigrants.
Alexandra Clément, qui est arrivée à Donnelly avec son mari, ses deux enfants et leur petit chien en septembre 2023, affirme que le processus est complexe et que même après un an, sa famille n’a toujours pas la certitude de pouvoir rester.
«Le site est très compliqué, explique Alexandra. On ne s’est pas fait aider, on l’a fait par nous-même et au final, on a perdu du temps et ça nous a coûté de l’argent.»
Après une première demande de permis de travail rejeté, la famille Clément a de nouveau tenté leur chance. Cette fois-ci, ça a été une réussite pour les parents, mais la demande d’études pour les enfants, elle, n’a pas passé. C’est grâce au Conseil scolaire du Nord-Ouest (CSNO), affirme Alexandra Clément, qu’ils ont pu faire avancer les démarches.
Après avoir trouvé un emploi au sein de la communauté francophone de Falher, la famille originaire de Biganos a rapidement eu la certitude d’avoir fait le bon choix. «C’est comme si j’étais là depuis longtemps», explique Alexandra.
Immigrer en milieu rural
Crystal Tremblay, directrice du Family and Community Social Services (FCSS) de la région de Smoky River et résidente de la région depuis huit ans, affirme que développer un sentiment d’appartenance à sa communauté est une étape clé lorsqu’une personne immigre. «Il n’y a rien de plus important que de se sentir chez soi au sein de sa communauté. Si tu te sens chez toi, tu y restes et tu développes une meilleure santé mentale. Un meilleur style de vie. Ta qualité de vie augmente. Si l’appui communautaire manque, c’est très difficile de s’adapter, surtout pour les jeunes familles.»
Par moment, le mal du pays frappe, mais Frédéric et Alexandra sont reconnaissants de la chance que leur a donnés la communauté scolaire de l’École Héritage. Lui, enseignant d’études sociales au secondaire, et elle, assistante en éducation, ont trouvé à Falher l’environnement scolaire dont ils étaient à la recherche. «C’est vraiment comme une famille [à l’école]. Je ne sais pas si, dans une grande ville en Alberta, ça aurait été la même chose. J’ai des doutes», avoue-t-elle.
Pour favoriser la vie familiale, habiter en milieu rural a ses avantages. Par contre, l’isolement géographique des petites communautés pose quelques défis. Le plus grand est la distance à parcourir pour avoir accès à certains services essentiels. La directrice de FCSS reconnaît que pour les immigrants, le transport est souvent une source d’inquiétude.
Pour un nouvel arrivant à Donnelly, par exemple, il n’y a aucun magasin. Les plus près sont à Falher, mais les prix sont beaucoup plus chers dans ces petites épiceries éloignées. De plus, il n’existe pas de système de transport en commun pour transporter une personne vers celles-ci. Pour trouver de meilleurs prix, il faut voyager à plus de 60 ou même 150 kilomètres et avec son propre véhicule. «Plusieurs [immigrants] viennent de plus grands centres avant d’arriver dans de plus petits centres. C’est un choc culturel», remarque Crystal Tremblay.
L’assistante en éducation reconnaît les différences entre sa vie à Biganos et sa vie à Donnelly. «C’est vrai qu’en France, on avait vraiment tout à côté, dit-elle. On avait trois, quatre centres commerciaux à cinq minutes, même dans une petite ville.» Pour sa part, elle témoigne s’être bien adaptée à vivre avec l’essentiel.
Une période de stress et d’incertitude
Les Clément attendent toujours le renouvellement de leur permis de travail et le gouvernement ne fait que prolonger les délais de traitement. Ayant la certitude de vouloir rester dans la région, le seul défi qu’il leur reste est lié aux visas. «C’est vraiment une source de stress», avoue la mère de famille. «Je vois la différence entre une personne qui a immigré, il y a dix ans, et une personne qui immigre. Ça n’a rien à voir», ajoute-t-elle.
La directrice du FCSS, pour sa part, admet que l’organisation pour laquelle elle travaille ne s’implique pas tant dans le processus d’immigration. «Nous ne pouvons pas tout faire, mais nous essayons de savoir comment aider les gens du mieux que nous le pouvons.»
Grâce à leur implication dans la communauté, les employés du FCSS savent où diriger les familles immigrantes s’ils ont besoin d’un service qui se trouve hors de leur domaine d’expertise. L’organisation peut, cependant, aider un nouvel immigrant à rencontrer les membres de la communauté, faire des démarches pour bénéficier de l’aide de Services de santé Alberta, recevoir des paniers de nourriture de la banque alimentaire, s’inscrire à des cours de langues officielles, s’équiper en vêtements d’hiver, rédiger un curriculum vitae et effectuer gratuitement leurs déclarations de revenus annuelles.
Malgré le stress lié aux délais de traitement, la famille Clément n’a aucun doute que leur avenir se trouve dans la région de Rivière-la-Paix. Pour toute l’incertitude liée aux démarches juridiques de leur immigration, ils ont autant de certitude d’avoir trouvé leur nouvelle communauté. «On sait qu’on veut être ici, confirme Alexandra. Dès qu’on le pourra, on demandera la résidence permanente.»
Glossaire – Incertitude : Caractère d’imprécision