Mélodie Charest
Mélodie Charest
La ferme familiale Charlotte Lake Farms, à Bonnyville, élève des bœufs et cultive des citrouilles et du maïs. En 2014, Guy et Léona Bonneau prennent la relève : ils sont la troisième génération. Leur objectif : tendre à la spécialisation de l’élevage de bœufs.
Le couple se consacre à temps plein à leurs troupeaux, ce qui leur permet d’avoir 438 bœufs, tout en utilisant une technique d’élevage un peu plus écoresponsable : la rotation des pâturage. Il planifie leurs activités agricoles afin «d’utiliser toutes les ressources de la ferme, les bêtes et les récoltes», explique Guy.
Parmi les techniques dites écoresponsables de l’élevage, on retrouve la rotation des pâturages. Dans la production conventionnelle, le bétail est nourri, pendant les derniers mois de son élevage, aux céréales ou au maïs pour accélérer sa croissance et son engraissement.
Dans la rotation des pâturages, on ne fait pas cette étape de finition. On déplace plutôt les bœufs sur différents sites de pâturage tout au long de leur croissance. L’avantage : peu de machines sont nécessaires.
Et si cette méthode d’élevage est économe en énergie, elle permet aussi d’offrir une transparence et une qualité de viande aujourd’hui apprécié par le consommateur. «On vend du bœuf de la ferme aux consommateurs. Je trouve qu’il y a plus de gens qui désirent savoir comment leur nourriture est produite», souligne l’éleveur.
Avec une onde d’humour dans sa réponse, Guy nous affirme qu’il lui est impossible de demander au grand-père de Léona si la technique du pâturage en rotation était utilisée en 1911 sur la ferme de Bonnyville. Il peut toutefois nous assurer que la technique était peu utilisée lorsque le père de son épouse avait la ferme.
Et encore aujourd’hui, peu de ses homologues utilisent la technique. «C’est beaucoup plus de travail», dit-il honnêtement. Le déménagement des vaches d’un pâturage à un autre demande de l’entraînement pour le bétail, ce qui n’est pas toujours évident. En plus de cet entraînement, les éleveurs, comme la famille Bonneau, doivent s’assurer que les bœufs sont bien clôturés et qu’ils sont suffisamment approvisionnés en eau.
Celui qui a travaillé pendant de nombreuses années dans des banques est bien placé pour expliquer les implications économiques de telles mesures. «C’est cher à établir, mais après, il y a des avantages [économiques] : on a plus d’herbes, les vaches sont plus pétantes». Il insiste avec humour, «les vaches sont contentes, les plantes sont contentes et le sol est content»
L’élevage de bœufs mobilise des quantités très importantes d’eau. Selon Greenpeace, une organisation non gouvernementale internationale de protection de l’environnement, 403 000 litres d’eau sont nécessaires pour produire «l’équivalent d’un an de viande et de produits laitiers. C’est 17 douches par jour et par personne pendant un an ! C’est sans compter que près du tiers des émissions de GES attribuées au secteur agricole proviennent des ruminants.
Malgré ces données alarmantes, l’expansion des pâturages au Canada semble être un des moyens de lutter contre les changements climatiques et la hausse des émissions de GES. En mars 2021, Canards Illimités Canada et deux autres partenaires ont mis en place un programme pour les éleveurs de bœufs afin de «rétablir l’herbage et le pâturage de 50 585 hectares de terres agricoles d’ici 2025», peut-on lire dans un communiqué de presse.
Cet organisme environnemental qui «conserve les milieux humides et les habitats qui s’y rattachent» affirme que les producteurs et les éleveurs bovins nourrissent le monde, mais que «rares sont ceux qui jouent aussi un rôle essentiel dans la protection du territoire, de l’eau, de la faune du Canada».
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Les pâturages sont des écosystèmes «les plus productifs et divers dans le monde». En plus de fournir un habitat à certaines espèces animales, les graminées vivaces permettent d’atténuer les émissions de GES en les séquestrant par photosynthèse. Avec leurs racines profondes, elles agissent comme filtre naturel de l’eau et en augmentent la qualité.