IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO
Jean Doyon est entré en fonction à l’école francophone de Red Deer en 2010, à une époque où la diversité était «minime». Peu de temps après, une première vague d’immigration francophone, incluant des Camerounais, a fait son arrivée. «Ce sont eux qui ont vraiment commencé à apporter une nouvelle dynamique à l’école. Et nous le savons, ces personnes contribuent à la croissance démographique de la francophonie. Ils sont importants», explique-t-il.
Au fil des années, des liens amicaux et naturels se sont tissés entre lui et les membres de la communauté camerounaise, notamment à travers des joutes de soccer auxquelles le directeur prenait plaisir à participer. «On a organisé des matchs annuels à un certain point avec des enseignants et des membres de la communauté scolaire. C’était avant la pandémie», se remémore-t-il.
Lorsqu’il a officiellement annoncé son départ au début de mai, l’Association des Camerounais du Centre de l’Alberta a donc tenu à organiser un match ultime en son honneur. Une vilaine blessure le tenant à l’écart du jeu, la communauté marocaine a été sollicitée en remplacement. Cette diaspora, qui commence, elle aussi, à laisser sa marque sur l’École La Prairie, dispose de sa propre équipe de soccer.
«Au moins, j’ai pu assister au match. C’était une super belle expérience de voir toutes ces personnes-là de la communauté francophone s’affronter comme ça et apprendre à se connaître», mentionne Jean Doyon.
Parmi la centaine de personnes présentes se trouvaient des parents d’élèves, des enseignants, et des divers membres de la communauté francophone de Red Deer. Le maire de Blackfalds et le représentant du maire de Red Deer ont aussi fait le déplacement.
Un impact qui dépasse les frontières scolaires
Noureddine Sekkat, responsable de l’équipe de soccer marocaine de Red Deer, raconte qu’il n’a pas hésité à accepter l’invitation des Camerounais pour participer à l’évènement en reconnaissance du directeur de l’école. «Nous avons répondu à l’appel avec plaisir. Nous pensions pouvoir jouer à l’extérieur, mais à cause de la pluie, nous avons joué à l’intérieur», souligne-t-il. Il précise également que le mérite de l’organisation revient «entièrement à l’Association des Camerounais» qui s’est occupée de tous les détails, «de A à Z».
Souligner le départ de Jean Doyon revêtait une grande importance, non seulement pour reconnaître son engagement prolongé envers l’école, mais aussi pour saluer son soutien envers l’intégration et la valorisation culturelle des nouveaux arrivants à Red Deer, explique Armand Fonda, président de l’Association des Camerounais du Centre de l’Alberta.
«Il nous a soutenus dans l’organisation de plusieurs de nos activités culturelles. La plupart de nos enfants sont passés par son école et nous gardons de merveilleux souvenirs.» Il rappelle que les membres de sa diaspora sont souvent orientés vers le système d’éducation francophone à leur arrivée dans la province pour des raisons linguistiques évidentes. «Une grande majorité de Camerounais ont le français comme langue maternelle», insiste-t-il.
Une opinion partagée par Ghislane Ismaili, une mère de famille qui a l’habitude de faire du bénévolat pour Francophonie Albertaine Plurielle (FRAP). D’après elle, cette initiative a en effet permis un certain renvoi d’ascenseur pour remercier un homme qui a été au service de la communauté pendant «tant d’années».
«Ça fait seulement neuf mois que je suis arrivée au Canada et j’ai galéré au début parce que mes enfants ne pouvaient pas accéder à l’école. Monsieur Doyon était toujours présent, il a tout fait pour m’aider, il est resté à côté de moi pendant des heures, alors que je remplissais des formulaires», relate-t-elle avec émotion. Ces dernières semaines, elle a entendu de nombreux récits similaires de la part d’autres familles qui ont également bénéficié du soutien du directeur d’école.
«Pour nous qui sommes de nouveaux arrivants, avoir quelqu’un qui nous aide de la sorte, c’est la chose la plus précieuse que l’on peut recevoir.»
Tout en humilité
Visiblement touché par cette attention, Jean Doyon admet ne pas avoir réalisé «sur le coup» toute l’ampleur de la célébration organisée en son honneur ni l’impact qu’il avait eu dans la vie de tant de nouveaux arrivants. «Ils m’ont donné l’impression que j’ai fait une réelle différence pour eux, en matière d’accueil et d’intégration.»
Pourtant, il a toujours pris à cœur le mandat d’accueil et d’intégration que sous-tendait son travail auprès des jeunes. Il est d’ailleurs à l’origine de l’établissement du bureau satellite de la FRAP à Red Deer, ce qui a permis à Hervé Thierry Njanjouo de commencer son mandat de travailleur en établissement.
«Je sentais le besoin qu’on accueille correctement nos familles immigrantes. L’effet a été très positif avec Hervé», mentionne-t-il. «On a intérêt à s’assurer que les enfants se sentent bien. Quand ça va bien à l’école, c’est un souci de moins pour les parents», ajoute-t-il.
Même si son départ de l’école marque la fin de cette collaboration étroite, le directeur d’école prévoit maintenir des liens étroits avec la communauté scolaire. «Ma prochaine étape est incertaine […], mais je vais continuer à participer aux évènements communautaires si on m’y invite», assure-t-il enfin.
Glossaire : Retour d’ascenseur : Rendre un service par réciprocité