le Mercredi 11 décembre 2024
le Lundi 18 novembre 2024 14:31 Communautaire

L’histoire noire francophone en Alberta doit être documentée

Avant de documenter son histoire, il faut se rassembler et la partager. Photo : Courtoisie
Avant de documenter son histoire, il faut se rassembler et la partager. Photo : Courtoisie
Des ateliers virtuels organisés par l’organisme Kayanou et la Société historique francophone de l’Alberta sensibilisent la population noire francophone de la province afin de lui faire comprendre l’importance d’archiver son histoire.
L’histoire noire francophone en Alberta doit être documentée
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IJL – RÉSEAU.PRESSE – LE FRANCO

Denis Perreaux, directeur général de la Société historique francophone de l’Alberta. Photo : Courtoisie 

Les 18 et 25 octobre dernier, l’organisme Kayanou, en collaboration avec la Société historique francophone de l’Alberta (SHFA), a organisé des ateliers ciblant les communautés noires francophones. Le but était de leur faire comprendre l’importance de l’archivage communautaire. 

Rendu possible grâce à des fonds d’appui de Patrimoine canadien et de l’Edmonton Heritage Council, l’atelier a bien été reçu et a motivé plusieurs personnes à entreprendre les premières étapes de l’archivage.

Les archives existantes

En ce jour, les associations historiques albertaines ne possèdent aucune archive sur le patrimoine noir francophone. Même si on parle d’une grande population, une «pénurie de documentation» persiste, explique Denis Perreaux, le directeur général de la SHFA. 

Mireille Isidore, cofondatrice de Kayanou et maintenant directrice générale de l’organisme, confirme que «l’histoire des Noirs est une histoire méconnue. Elle n’est ni écrite ni documentée, que ce soit au niveau organisationnel ou au niveau individuel.» Le projet sert donc à «valoriser l’importance des archives», ce qui résume parfaitement la mission de Kayanou. Pour l’organisme qui tient à préserver et promouvoir l’histoire des communautés noires francophones en Alberta, faire découvrir l’archivage à leur clientèle cible est une étape fondamentale. 

La cause de la pénurie d’archives est partiellement culturelle, explique le directeur général de la SHFA. Beaucoup de personnes noires «sont des conteurs, des personnes qui racontent à travers la musique, la performance». L’oral a une importance majeure dans ces différentes cultures. Il ajoute que plusieurs «ont vécu la violence coloniale ethnique et trouvent impensable qu’on remette nos documents personnels au gouvernement. [C’est] un risque énorme dans certains pays de dévoiler tous les secrets familiaux aux gouvernements».

Pour Mireille Isidore, qui est résidente d’Edmonton depuis près de 25 ans et historienne de formation, s’engager dans cette initiative, c’est «non seulement pour développer le sentiment d’appartenance à la francophonie plurielle, mais aussi pour l’on puisse développer des ressources pédagogiques à l’intention des enseignants et des écoles».

Apprendre à documenter l’histoire

Durant l’atelier, les organisateurs encourageaient les participants à partager leurs histoires. Ces dernières seront ensuite documentées à la fin du projet. 

Afin de documenter autant de composantes possibles de l’histoire, Kayanou et la SHFA ont créé un groupe appelé les «Mamans dynamiques». Ces mamans agissent en tant que «marraines spirituelles», explique Denis Perreaux. Ce sont les aînés du groupe et elles racontent leurs histoires afin de les archiver et d’assurer leur pérennité. Une grande place leur est accordée. 

Mireille Isidore ajoute que la jeunesse a aussi un rôle à jouer dans ce projet. Ce sont, selon elle, «les gardiens de cette documentation et de la préservation du patrimoine». Ils doivent comprendre la différence entre la temporalité de ce qui est publié sur les réseaux sociaux et l’immortalité des archives, explique-t-elle. 

Mireille Isidore, cofondatrice et directrice générale de Kayanou. Photo : Courtoisie

L’engagement communautaire

La solution à la pénurie d’archives commence avec l’engagement communautaire. Il faut approcher les aînés, que ce soit nos proches ou non, et écouter leurs anecdotes, leurs histoires. Il faut ensuite trier et déterminer ce qui est à conserver. 

Après avoir choisi un centre d’archives à qui remettre l’information recueillie, les prochaines étapes sont effectuées par les archivistes. Il faut cependant se souvenir de préciser à quel moment rendre l’information accessible au public. 

Pour la directrice générale de Kayanou, accepter de rendre publique son histoire est une forme d’engagement envers sa communauté. Mais cela ne se termine pas là. «Il faut que la communauté s’engage à faire du bénévolat et à aider à organiser les collections», dit-elle.

La pertinence des ateliers

Près d’une vingtaine de participants ont écouté l’atelier virtuel du 18 octobre. La réception a été positive, confirment Denis Perreaux et Mireille Isidore. Un deuxième atelier a eu lieu le 25 octobre afin d’explorer plus en détail pourquoi il y a une pénurie d’information et pourquoi il est nécessaire d’établir des collections pour documenter l’histoire noire. 

Contribuer à cette initiative, c’est investir dans la communauté francophone afin de comprendre son passé et c’est aussi investir dans son avenir. Tout cela se passe maintenant. «L’histoire s’écrit au présent, explique Mireille Isidore. Il ne s’agit pas de créer une histoire parallèle. Il s’agit d’enrichir l’histoire de la francophonie.»

Glossaire – Pénurie : Manque total ou presque total de quelque chose de nécessaire