IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO
Encore quelque peu méconnue et critiquée par certains experts, la naturopathie en Alberta est pourtant un domaine agréé, fondé sur des données probantes, explique la Dre Mélanie Robinson. «Pour être docteur en naturopathie, c’est un minimum de huit ans d’études postsecondaires. Nos deux premières années en naturopathie [s’apparentent] à la médecine conventionnelle. On apprend tout le côté pharmacologique, mais aussi les alternatives», précise-t-elle.
Au même titre que les médecins le font, les naturopathes peuvent d’ailleurs commander divers tests de laboratoire pour obtenir une vision approfondie de la santé de leurs patients. «J’adore les tests, j’aime regarder les échographies. Le plus de données médicales que j’ai en ma possession, le mieux je peux aider», ajoute-t-elle.
La grande distinction entre la médecine traditionnelle et la naturopathie réside donc dans son approche holistique. Contrairement à la simple gestion des symptômes, la naturopathie cherche à comprendre les facteurs environnementaux, psychologiques et émotionnels qui sont à la racine d’une maladie.
«On ne parle pas seulement de symptômes physiques. Certains [patients] peuvent avoir subi des traumatismes et c’est ce qui influence leur condition. J’essaie d’aller en profondeur et c’est très individualisé. Chaque cas est assez unique», décrit la Dre Robinson.
Une demande grandissante
À la Naturally Inclined Health Clinic où elle exerce à Edmonton, elle prend en charge un large éventail de patients, notamment des enfants, des mères et des femmes. Elle traite ainsi divers problèmes médicaux. Chez les femmes, les consultations sont souvent liées à des problèmes hormonaux, à la ménopause, à la fertilité et au syndrome prémenstruel.
La spécialiste constate également une augmentation du nombre de patients pédiatriques qui présentent des conditions telles que le trouble déficitaire de l’attention, des allergies, de l’asthme, ainsi que des problèmes d’anxiété et de constipation. «J’ai dû accepter moins d’hommes dans les trois dernières années en raison de la demande grandissante chez les enfants», ajoute-t-elle.
Elle ne s’étonne pas de voir cette tendance se dessiner, d’abord parce que le réseau de soins primaires de la province ne répond pas toujours aux attentes des patients, ce qui les incite à chercher des solutions alternatives. Mais aussi parce que le système est saturé et qu’ils sont plusieurs à ne pas avoir accès à un médecin de famille.
«J’ai beaucoup de clients qui n’ont pas de médecine de famille… ou bien ils ont pris leur retraite ou ils ont déménagé à l’extérieur de la province… Je vois ça de plus en plus, alors on devient un point d’accès», mentionne Dre Robinson.
Des soins sur mesure
Les naturopathes consacrent souvent trois fois plus de temps à un nouveau patient que ne le fait un médecin, explique Dre Alexandra Smith, qui pratique à la clinique Neurvana Naturopathic Medicine à Calgary. Cette approche peut être rassurante pour ceux qui ont besoin d’être écoutés et entendus concernant leurs problèmes de santé.
«Au début, je passe quatre-vingt-dix minutes avec eux. Pour commencer, on pose des questions pour comprendre l’état actuel de chaque personne et son historique médical. Ensuite, on détermine les tests qui doivent être réalisés : analyses sanguines, des selles et urinaires», souligne celle qui se spécialise dans la santé des femmes.
Lors de la deuxième consultation, elle analyse les résultats des tests avec les patients et établit un plan de santé formel qui couvre, notamment, la nutrition, l’exercice, la gestion du stress et la prise de suppléments au besoin.
La naturopathe recommande également des changements dans les habitudes de vie, parfois aussi simples que de passer du temps à l’extérieur chaque jour, en particulier pendant l’hiver. «La lumière du soleil est tellement importante», insiste-t-elle.
Le seul maillon manquant dans cette approche holistique réside dans l’incapacité des naturopathes à prescrire des médicaments en Alberta. «Ce serait super de pouvoir soigner les patients avec une plus grande gamme d’options. C’est quelque chose qui manque dans notre pratique actuelle», déplore-t-elle.
Un modèle similaire à celui de la Colombie-Britannique, où les naturopathes sont autorisés à prescrire certains médicaments et même à pratiquer la vaccination s’ils ont suivi la formation requise, pourrait être envisagé. Selon la Dre Smith, cela permettrait aux naturopathes de l’Alberta d’assumer un rôle de «praticiens en soins de première ligne».
En français, s’il vous plaît
Pour les Franco-Albertains qui ne disposent pas d’un médecin de famille francophone, consulter un naturopathe peut être la seule occasion de recevoir des soins médicaux dans leur langue maternelle, un aspect jugé «crucial» dans la prestation de soins. Dans ces cas précis, les consultations peuvent se dérouler entièrement en français malgré que les dossiers médicaux et les formulaires à remplir soient en anglais.
Bien que peu courantes, les consultations en français au cabinet de la Dre Smith sont toujours chaleureusement accueillies. «J’offre mes services dans les deux langues», précise cette francophile. Quant à la clinique de la Dre Robinson, c’est environ le quart de sa pratique qui se déroule dans la langue de Molière. «La moitié de ma journée aujourd’hui s’est passée en français. Chaque semaine, j’ai au moins un ou deux francophones», mentionne celle qui est originaire de Bonnyville.
Glossaire – Agréé : Qui est reconnu par une autorité