La région de Smoky River compte 1684 âmes. Presque la moitié sont bilingues et l’autre moitié parle uniquement l’anglais. Seuls 10 résidents ne parlent aucune des deux langues officielles alors que le même nombre ne s’exprime qu’en français. Bien que la francophonie soit très présente dans la région, sa représentation dans les services de santé l’est beaucoup moins.
Selon Shelly Willsey, directrice des communications pour la zone Nord des Services de santé de l’Alberta (AHS), «dans l’ensemble de l’Alberta, il y a 2 044 médecins dans divers domaines de la santé qui s’identifient comme offrant des services en français». Cependant, dans la zone Nord qui comprend essentiellement tout le nord d’Edmonton, Smoky River ainsi que Jasper, Hinton, Edson et Grande Cache à l’ouest, il n’y en a que 17 sur un total de 670.
Malgré un nombre limité de médecins, AHS emploie tout de même 11 133 personnes dans cette zone pour une population totale de 480 924 habitants. Un nombre qui ne suffit pas puisque les Services de santé de l’Alberta collaborent toujours avec d’autres services d’urgence pour offrir les meilleures options possibles aux résidents.
Des services d’urgence solidaires pour mieux servir
«Nous répondons en tant que premiers répondants aux appels médicaux dans la région», dit Marcel Maure, le chef des pompiers, directeur de la gestion des urgences et directeur des services de protection pour la région de Smoky River. Il ajoute que le temps d’attente pour une ambulance est normalement de 10 à 40 minutes. Tout dépend de l’endroit d’où viennent les ambulances.
«Nous pratiquerons la réanimation cardiopulmonaire (RCP) et tout ce qui est nécessaire avant l’arrivée de l’ambulance», dit le professionnel francophone. Les 28 pompiers sont formés en RCP et en premiers secours médicaux.
Bien que Marcel Maure ait rempli 28 des 30 postes de pompiers de garde, il dit que «ce n’est pas tous les jours que nous avons de nouvelles recrues». Certains de ses pompiers sont en service depuis 45 ans. Alors la crainte de les voir prendre leur retraite est bien légitime s’il n’y a personne pour les remplacer.
Bilingue, Marcel Maure, comme ces collègues pompiers, n’a jamais eu de problème de communication lors d’une intervention d’urgence. Cependant, «parfois, nous recevons des ambulanciers de l’extérieur de la région. Il y a des résidents qui sont des Français et qui parlent un anglais approximatif». Il est donc nécessaire d’envoyer un pompier pour traduire et aider pendant l’intervention.
Pour certains, ce n’est toujours pas suffisant
Même si les pompiers et les Services de santé de l’Alberta travaillent ensemble, ce n’est parfois pas suffisant. Randy Fillion, le technicien du son de la radio communautaire Nord-Ouest FM, explique qu’il a emmené récemment deux de ses enfants au Stollery Children’s Hospital, l’hôpital pédiatrique situé à Edmonton.
Nadia a aujourd’hui quatre ans et est née dans ce même hôpital. C’était à l’époque le seul endroit où l’on pouvait obtenir les services d’une sage-femme dans le nord de la province. Un facteur essentiel pour l’épouse de Randy, alors que leur fille, bébé naissant, était atteinte d’un syndrome hypoplasique (développement insuffisant) du ventricule gauche.
L’enfant a alors dû séjourner à l’hôpital pendant les six premiers mois de sa vie. Pendant cette longue période, Randy faisait régulièrement les déplacements entre Donnelly à Edmonton. «Trois cent quarante kilomètres, trois ou quatre fois par mois», explique-t-il. Un rythme effréné qui s’est ralenti depuis que Nadia a subi sa dernière opération. «Heureusement, maintenant nous ne devons y aller que deux ou trois fois par an», dit-il.
Récemment, Adèle s’est cassé le pied. Il aurait aimé aller au centre hospitalier de Grande Prairie, mais «toutes les chirurgies orthopédiques se font à Edmonton». Alors il a repris le volant pour y amener sa fille de sept ans sans avoir vraiment le choix.
Finalement, après avoir bénéficié de soins et des services médicaux de qualité dans la capitale provinciale, Randy s’étonne du temps qu’il doit attendre pour obtenir des services médicaux généraux dans sa région. Et quand il veut un rendez-vous, «il faut que j’attende deux ou trois semaines au moins». Il remarque que cela allait bien plus vite en ville.
Les Services de santé de l’Alberta (AHS) innovent pour recruter
Face à certains défis concernant les services de santé dans la région, Shelly Willsey explique que AHS fait tout son possible pour assurer la présence de professionnels de la santé et de médecins avant de réduire le nombre de lits et/ou de places de soins dans ces établissements. Elle ajoute que «les réductions temporaires ne sont effectuées qu’en dernier recours».
AHS a mis en place une équipe spécialisée qui se consacre à la mise en œuvre de solutions pour soutenir les efforts de recrutement dans toute la province. La directrice des communications explique que l’autorité sanitaire a créé une page consacrée aux carrières en santé en région rurale.
AHS évoque un plan stratégique en cinq étapes afin de faciliter les embauches dans les secteurs en tension. «Il inclut la recherche active d’embauche dans les secteurs critiques de la santé par LinkedIn, Indeed et d’autres réseaux d’emplois ainsi qu’avec les associations professionnelles.»
Elle espère tirer parti de la rétention d’une main-d’œuvre accrue en cas de pandémie par le biais d’une campagne rurale ciblée. Elle souligne que AHS collabore au Rural Health Professional Plan (RhPAP) afin d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies d’attraction et de rétention pour des communautés et des professions particulières.
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Shelly Willsey ajoute aussi que les «Services de santé de l’Alberta participent à divers salons de l’emploi virtuels avec des gestionnaires ruraux pour mettre en évidence leurs postes critiques vacants» et met en œuvre des initiatives pour les diplômés du printemps et les étudiants de premier cycle.