IJL-RÉSEAU.PRESSE-LE FRANCO
«On utilise régulièrement les drones dans nos enquêtes pour déterminer la cause d’un incendie. […] Comme nous devons enquêter sur plus de 1000 feux [par année], il est très utile d’avoir un outil capable de prendre des photos précises et d’analyser l’endroit où ça a commencé», explique d’entrée de jeu Josée St-Onge, agente d’information francophone du service d’incendies provincial, Alberta Wildfire.
Elle précise que les drones assistent également les équipes au sol lorsque les feux sont actifs. Par exemple, au sud-est de Fort McMurray, là où un brasier a brûlé quelques dizaines de milliers d’hectares de forêt en mai dernier, des appareils ont été utilisés pour recenser les points chauds à proximité de la communauté. «On a fait des scans thermiques régulièrement pour s’assurer de détecter les endroits à risque.»
Et depuis 2022, un système de prédiction des feux de forêt a été mis en place au niveau provincial grâce à une collaboration entre Alberta Wildfire et AltaML. Cet outil, qui utilise l’intelligence artificielle, permet de déterminer la probabilité qu’un nouveau feu se déclare dans une zone donnée. «Il fait des prédictions basées sur les conditions météorologiques régionales, les conditions forestières, ainsi que les données historiques des incendies.»
En plus de leur utilisation sur le terrain, les dispositifs aériens peuvent en effet jouer un rôle essentiel dans la prévention, rappelle Jeff Boisvert, professeur à la faculté d’ingénierie de l’Université de l’Alberta, spécialisé dans la gestion des feux de forêt. «Ils aident à faire des prédictions, mais aussi à mesurer et cartographier la quantité de combustible pour qu’on puisse éliminer l’excédent», explique-t-il. Par combustible, l’expert fait référence aux herbes, broussailles et arbres qui peuvent nourrir les flammes d’un brasier.
L’élimination de cette végétation inflammable à des endroits stratégiques permet d’assurer la sécurité des communautés, particulièrement celles qui bordent des endroits à haut risque d’incendie. «Contrairement aux satellites, les drones nous donnent des images en haute résolution et ça évite aux équipes d’avoir à se déplacer pour faire l’inventaire de tous ces combustibles», analyse-t-il.
Les limites de la technologie
Malgré les avantages tangibles qu’ils peuvent apporter sur le terrain, les drones, comme tout appareil technologique, présentent toutefois certaines limitations, laisse entendre l’expert. «Il y a deux catégories : les limitations matérielles et celles qui sont d’ordre opérationnel.»
La durée de vie des batteries, la luminosité et la résolution des images peuvent poser des contraintes pour les équipes qui manipulent des drones. «Il y a aussi le fait que les drones ne peuvent pas voir à travers les arbres et que, parfois, il y a des zones actives qui peuvent être manquées», explique le professeur.
Il rappelle cependant que les avancées technologiques des cinq dernières années, ainsi que celles en cours, ont largement atténué ces obstacles technologiques.
L’enjeu le plus prenant, ajoute Jeff Boisvert, réside plutôt au niveau opérationnel. La conjonction de l’espace aérien avec d’autres aéronefs tels que les avions et les hélicoptères peut être problématique. En effet, bien qu’il n’existe pas de réglementation explicite interdisant aux drones de voler en même temps que d’autres appareils en Alberta, les mesures actuelles de prévention ne sont pas jugées suffisantes pour coordonner l’espace aérien en toute sécurité. Cela relègue les drones à un rôle secondaire et à des vols de nuit pour minimiser les risques de collision.
«Si on trouve un moyen d’intégrer les drones et les autres appareils en toute sécurité, je pense que ça serait bénéfique et ça permettrait une meilleure intégration des drones dans les activités journalières des pompiers forestiers», ajoute Jeff Boisvert.
Interrogé sur les défis potentiels de l’inclusion des drones dans le travail de ses équipes, Alberta Wildfire a formulé une réponse quelque peu évasive à la rédaction.
«Le gouvernement de l’Alberta, en collaboration avec Alberta Wildfire, évalue constamment les technologies que nous utilisons pour améliorer notre processus et être plus efficaces. […] Les meilleures pratiques de gestion des feux de forêt évoluent constamment, ce qui souligne l’importance de la recherche et de l’adoption de nouvelles technologies et pratiques innovantes.»
Glossaire – Évasif : Vague, imprécis