Le manque de visibilité de plusieurs entreprises, programmes et organismes de la communauté franco-albertaine exacerbe les difficultés qu’entraîne la préservation d’une culture minoritaire. Étant l’avenir de la francophonie, qu’en pensent les jeunes?
Selon un article de Radio-Canada intitulé Les francophones augmentent plus vite en Alberta qu’ailleurs au Canada, de l’année 2001 à 2016, le pourcentage de francophone vivant dans la province princesse aurait connu une hausse de 35,7 % et le site web officiel de l’Alberta nous informe que 268 615 Albertains et Albertaines parlaient le français en 2016.
Cependant, d’après L’Encyclopédie canadienne, 75% des Franco-Albertains ne sont pas originaires de cette province, ils viennent d’outre-mer ou d’autres régions du pays. Avec un tel afflux de migrants et d’immigrants, les programmes, entreprises et services offerts en français sont d’importances primordiales, surtout pour les jeunes.
Certains adolescents franco-albertains, comme Lionnel Datte, un élève de 10e année, remarque que les organismes en français sont présents, mais manquent de visibilité et que cela peut faire du tort à la communauté francophone. «Elles ne sont pas assez introduites à la communauté, donc il y a de nombreuses familles qui ne sont pas au courant de leur existence», explique-t-il.
Le Centre d’appui familial est un organisme opérant au sud de l’Alberta qui a pour but de soutenir les familles francophones, francophiles et exogames. La plupart de leurs clients ne sont pas originaires de cette province. Quarante pour cent sont des immigrants et 30% viennent d’autres provinces. Les clients entendent parler d’eux grâce à diverses méthodes, entre autres, par d’autres organismes, le bouche-à-oreille, les réseaux sociaux et les écoles. Mais est-ce assez?
Ceci pose un problème puisque certains élèves de 9e année quittent les écoles francophones pour terminer leurs études secondaires en immersion ou en anglais. Qu’est-ce que cela peut faire à leur appartenance à la francophonie?
Rosy Kezakimana est l’une de ces élèves et elle dit avoir pu préserver son sentiment d’affiliation à la communauté francophone. Elle a rejoint un programme d’immersion qui, selon elle, «supporte les élèves francophones aussi bien qu’il le peut». Elle se considère toujours francophone et pense finir son éducation dans le programme d’immersion française.
Gloire Nshimiye, une autre élève ayant récemment quitté une école francophone, n’est pas du même avis. Elle atteste qu’elle s’est sentie aliénée de sa communauté et délaissée par celle-ci maintenant qu’elle n’est plus dans une école francophone. «La francophonie en Alberta, dit-elle, c’est à l’école ou c’est nulle part». Elle n’est pas seule. Une enquête menée à l’école Alexandre-Taché auprès des élèves de la 10e à la 12e s’est montrée très révélatrice.
Émilie Dumoulin, élève francophone de 12e année, affirme ne pas connaître d’organismes francophones à l’extérieur de l’école. Quant à elle, Naïla Hashim, élève de 10e, soulève un point intéressant. Elle constate que les élèves francophones ont tendance à compter sur les habitudes de langue de notre société majoritairement anglophone lorsqu’ils sortent de l’école. Le problème serait-il un manque de dynamisme auprès des adolescents dans la communauté?
Un sondage mené auprès de 42 volontaires anonymes de la 9e à la 12e montre que 74% de ces élèves ressentent un rattachement à la communauté francophone, mais qu’à peu près 71% des élèves ne se sont jamais informés sur des programmes en français à l’extérieur de l’école.
Efraïm Djewoe, de la 11e, dit ne jamais avoir cherché des programmes en français, mais préfère plutôt s’engager dans les activités mentionnées à l’école. Fiston Ishimwe, dans la même année, éprouve un grand intérêt pour la francophonie à l’extérieur des murs de Taché et pense continuer son éducation dans la langue de Molière au Campus Saint-Jean.