Si un jour vous croisez sur les routes de l’Alberta, un francophone au volant d’un camion International KB7 rouge et noir de 1949, ne soyez pas surpris. Il s’agit de Mario Raymond. N’hésitez pas à l’interpeller, il se fera un plaisir de vous partager cette passion dévorante.
« J’ai les antiquités dans le sang ». Mais ce qu’il a dans les mains, c’est de l’or. Ébéniste de formation, il aime les essences de bois et leur transformation en meuble d’exception. Et pourtant, par un « malheureux » concours de circonstances, il effectue son stage de fin d’année dans une vitrerie.
Ce métier de vitrier devient son fil d’Ariane, il l’accompagnera tout au long de sa vie. Père de deux petites filles, il se rappelle notamment ses journées passées avec elles dans les brocantes, les vide-greniers.
Il collectionne alors les poupées Barbie, récupère de vieux outils, des meubles anciens, collectionne les objets à l’effigie du Canadien de Montréal. Sa vieille maison (1956) de Québec, qu’il rénove, se remplit alors inexorablement.
Le début d’une passion pour les véhicules anciens
C’est au fond de la cour de la maison familiale que tout a commencé. « Il y avait une vieille Jeep Willys de l’armée des années 40. Ma mère voulait s’en débarrasser, elle me l’a offerte. » Adolescent, il met les mains dans le cambouis, tâtonne, apprend et rénove.
Il se rappelle d’ailleurs un oncle, « qui n’était pas vraiment son oncle » qui lui a sûrement donné la piqûre. « Il aimait faire des cascades. Il avait une moto Indian de 1954 qui faisait du bruit, qui boucanait », raconte-t-il.
Plus tard, faute de moyens, il se met à acheter des « bazous », leur offre une cure de jeunesse et les revend avec profit. Dans les années 2000, de retour de Gaspésie, il découvre un « vieux pick-up sur un tas de roches ». Il cogne à la porte, celui-ci lui est cédé pour 600 $.
Rapidement, il en achète un deuxième pour récupérer les pièces, « je me retrouve avec deux vieilles carcasses International, une de 1951, l’autre de 1952 ». Un projet de restauration abandonné, faute de temps et de moyens. « Ce n’est que partie remise », se promet-il.
Une vie professionnelle « tambour battant »
Après 25 ans de carrière au Québec comme vitrier et coordinateur en génie civil ; une retraite sur les routes au volant d’un poids lourd entre les États-Unis et le Canada, il pose ses valises à Edmonton en 2007.
« Je suis arrivé la veille de la fête des Pères. Le dimanche matin à 7 h, je travaillais », s’amuse-t-il à dire. Il ajoute, « ici, je n’avais pas besoin de certification, mais plutôt des compétences à développer ». Une manière bien à lui de dénoncer un système québécois empêtré dans son administration.
Il a l’opportunité d’apprendre à conduire des engins de chantiers, « j’étais un enfant dans son carré de sable avec mon “bulldozer” et ma pelle mécanique ». Il rejoint aussi le Nord pour y construire des routes de glace.
Finalement en 2008, il se pose à nouveau et ouvre sa propre compagnie de vitrerie sous les conseils bienveillants de ses amis de la francophonie et du Conseil de Développement Économique de l’Alberta.
Un patrimoine à partager
Mario Raymond n’a jamais oublié sa promesse. Son entreprise pérenne, il acquiert en 2016, un camion International KB7, de 1949 en état. « J’ai l’ai visualisé. J’ai pris un vol pour Lethbridge et je suis revenu avec, tout simplement », lâche-t-il avec satisfaction.
Aujourd’hui, c’est son véhicule d’entreprise. Il y a installé un module en bois pour y ranger ses vitres, réparer la transmission. Une façon de combiner sa passion et son métier.
Il achète ensuite un Ford Model T de 1919. « Juste d’apprendre à le conduire, c’était un défi incroyable », raconte-t-il, amusé. Désireux de le remettre sur la route de manière sécuritaire, il opte pour un moteur électrique, moins coûteux.
Sa passion n’a plus de limites, si ce n’est peut-être la rentabilité et les coûts d’entretien et d’assurances de ces engins.
Il a notamment un International Panel KB-1 de 1948 ; une Hudson Essex de 1930 ; un International Harvester de 1939 ; un Dodge Power Wagon de 1954 ; une moto Honda Shadow convertie en « bobber street vintage » de 1988.
Aujourd’hui, il souhaite partager ses connaissances avec la communauté. « C’est une façon de faire revivre l’histoire, d’offrir ce patrimoine vivant aux plus jeunes générations afin que la transmission se fasse », explique-t-il.
Afin de pérenniser cette activité, il doit développer une solution d’affaires pour ses petits bijoux de mécanique. Il espère donc louer ses véhicules pour le grand écran, mais aussi des cérémonies, et bien d’autres évènements.
Il rêve aussi de sillonner les routes de la province avec d’autres passionnés au volant d’une Ferrari 500 F2 de 1953, et effectuer des levées de fonds pour des causes qui lui tiendraient à cœur. La francophonie en milieu minoritaire, par exemple.
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Mario Raymond : mario@marioglass.ca