«Si tu habites en Alberta, il faut trouver un moyen d’apprécier l’hiver et d’avoir du plaisir, c’est un peu comme ça que le ski joering a commencé pour moi quand j’étais jeune. Adulte, j’ai voulu recréer cet engouement», relate Sam Mitchell, une Calgarienne d’origine et fondatrice de Skijor Canada.
Inspiré par la tradition norvégienne, laquelle utilise des rennes pour tracter un skieur, le ski joering est aussi pratiqué avec un cavalier et son cheval en Alberta et en Europe. Cette passionnée du monde équestre propose donc, en 2016, à «quelques amis» de se réunir pour manger de la fondue au fromage et s’initier à cette discipline de manière informelle.
«Ça a été un gros succès, soixante-cinq personnes se sont présentées au final. Et ce qui m’a frappée, c’est à quel point tout le monde avait eu du plaisir et comment ça permettait de se réunir en communauté, comme une grosse famille. J’ai voulu rendre ça plus officiel et en faire profiter tout le monde», se remémore-t-elle.
L’année suivante, une première compétition ouverte au public, le Skijordue, est lancée. Les profits sont ensuite distribués au centre équestre Prairie Sky Equine Assist Therapy, une association caritative de Calgary qui offre des services aux enfants et aux adultes qui ont des handicaps ou d’autres enjeux de santé mentale.
La compétition Skijordue se tiendra le 2 mars prochain.
«Je pense qu’une des raisons pour lesquelles l’événement a été populaire dès la première année, c’est qu’il y a quelque chose de tellement albertain dans le fait de réunir des cowboys d’expérience et des skieurs téméraires. Ce sont des gens qui partagent le même genre de folie, mais qui n’ont pas l’habitude de se côtoyer», s’exclame Sam.
Depuis, la discipline continue de susciter l’engouement du public albertain. Kristina MacDonald, directrice des événements pour Banff & Lake Louise Tourism, souligne que la compétition, qui se déroule pendant le festival SnowDays à Banff, attire une foule imposante année après année.
«Ça crée une impulsion économique. Plusieurs membres de notre communauté commerciale nous ont dit que l’événement de Banff a considérablement augmenté le trafic vers leur entreprise», mentionne-t-elle.
Rappelons que l’édition de 2023 a rassemblé quelque 7000 spectateurs, comprenant à la fois des habitants locaux et des touristes, désireux d’assister aux épreuves de sauts acrobatiques, de relais, de vitesse et de parcours à obstacles.
«Le ski joering mélange assez bien la culture western de l’Alberta et l’idée du rodéo, avec les activités de montagne des Rocheuses. C’est une manière assez spéciale de représenter la culture de notre province», ajoute Kristina, en faisant échos aux propos de Sam Mitchell.
Un sport en voie de construction
Matt Monod, un skieur de la région de Banff et copropriétaire de l’entreprise familiale Monod Sports, a pris part à plusieurs compétitions de ski joering ces dernières années. Il raconte s’être découvert une passion pour l’équitation à travers la fusion de ces deux mondes.
«Dès la première fois où j’ai participé à une course, j’ai trouvé ça tellement impressionnant de voir les [cavaliers], d’apprécier leur [expertise]. L’équitation, je ne connaissais pas du tout, mais [ça] m’a donné envie d’apprendre à mon tour et j’ai commencé à prendre des cours», dit-il.
Ce francophile aimerait toutefois voir le sport évoluer dans les prochaines années de sorte que les rôles de cavalier et de skieur deviennent interchangeables. Selon lui, cela permettrait aux participants de développer une meilleure compréhension mutuelle de leurs disciplines et d’accroître la sécurité parfois défaillante dans ce genre d’événements.
«Je me dis que dans dix ans, on pourrait faire une manche avec le skieur comme cavalier et [vice versa]. Ce serait moins dangereux si l’on comprenait les enjeux de chaque sport. Parce que c’est sûr qu’il y a des risques de blessures plus élevés pour les skieurs», laisse-t-il entendre.
De son côté, Sam Mitchell entretient le rêve de rendre le ski joering encore plus «officiel» en instaurant un ensemble de règles normalisées à travers le Canada. «Imaginez si on avait un vrai circuit canadien et un championnat, on pourrait même organiser les finales à Calgary. Ce serait incroyable», conclut-elle avec enthousiasme.
Glossaire – Défaillant : Qui fait défaut