Les itinérants d’Edmonton raffolaient de sa vinaigrette au piment. Petit à petit, Joseph Dongo, originaire de Côte d’Ivoire, s’est lancé dans une aventure entrepreneuriale. Aujourd’hui, son produit s’impose dans les assiettes des consommateurs de sa communauté, et même au-delà.
Joseph Dongo a démarré la fabrication industrielle de sa vinaigrette, commercialisée sous la marque Candelice, en mars 2020, au début de la pandémie. Avant cela, il cuisinait à ses heures perdues. C’est à son domicile qu’il concoctait cette recette.
Une fois par mois, il faisait à manger pour les itinérants de la ville d’Edmonton, en reconnaissance à la Food Bank dont il était bénéficiaire.
Au menu de ces repas, il y avait notamment des sandwichs avec sa vinaigrette faite maison. Très tôt, il s’aperçoit que la vinaigrette est très demandée par les récipiendaires. « Ils voulaient toujours du pain avec de la vinaigrette », se souvient-il. Joseph, alors en quête d’emploi après un diplôme en génie des matériaux à la Northern Alberta Institute of Technology (NAIT), finit par nourrir l’idée d’en faire un business.
À ce stade, il veut se rassurer de la qualité de son produit, alors il le fait tester auprès de ses amis et des personnes de sa communauté. Tout comme les itinérants, ces derniers en redemandent. Convaincu, Joseph se lance dans les démarches administratives auprès de la province et de la Ville pour obtenir tous les agréments nécessaires à la commercialisation. Six mois plus tard, il concocte la recette inédite de la vinaigrette au piment, un ingrédient très présent dans les cuisines africaines.
Le piment fait la différence
Le succès est au rendez-vous, les clients en raffolent. « Les produits Candelice ne manquent point chez nous. Je préfère surtout la vinaigrette épicée avec les grillades », a confié Jean-Marc Eliaka.
Même son de cloche chez Colette Aké. En plus du bon goût, elle les trouve fluides et à la fois onctueuses. Colette soutient qu’elle ne se donne plus la peine d’en faire elle-même comme auparavant. La vinaigrette « made by Dongo » est l’accompagnement parfait de ses sandwiches pour le travail, affirme-t-elle.
Qu’est-ce qui fait la différence ? Joseph soutient que ses articles sont faibles en sodium et en cholestérol. Il poursuit en disant qu’ils sont quasi-bio, fait à base d’huile de Canola, d’ingrédients végétaux et d’épices exportées d’Afrique. Notamment le clou de girofle, aux nombreuses vertus sanitaires.
La distribution de masse, un défi
La qualité et le goût de ses articles ne font pas défaut, mais son plus grand défi est celui de la distribution. Après quelques mois de ventes directes, les articles sont désormais présents dans 7 épiceries d’Edmonton, dont 5 africaines, une pakistanaise et une hindoue.
Avec environ 500 boites écoulées par mois, l’entrepreneur fait face à plusieurs obstacles : celui du financement pour agrandir son affaire et minimiser les coûts de production. Ce qui lui permettrait d’augmenter sa production, être plus compétitif et présent dans les supermarchés albertains. Sans emploi, Joseph a dû s’autofinancer avec l’appui d’un proche. Il a démarré avec 2500 $ et investit aujourd’hui près de 20 000 $ pour faire tourner son affaire.
Un esprit créatif
La vinaigrette n’est pas sa première trouvaille. Lorsqu’il finit sa formation à NAIT, Joseph se lance dans la conception d’un appareil de chauffage électrique pour voiture (Automobil Heater System), pour lequel il détient un brevet de propriété intellectuelle canadien et états-unien. Le manque de financement le conduit cependant à ranger cette invention au tiroir, sans l’abandonner pour autant.
Marié et père de deux enfants, monsieur Dongo arrive en 2014 à Edmonton depuis la Côte d’Ivoire. Dans son pays, il a été 15 ans durant, ingénieur qualité à la Société ivoirienne de Raffinage, l’entreprise publique assurant le raffinage du pétrole brut et la distribution de produits pétroliers dans le pays.
Outre, les difficultés ordinaires à tous nouveaux arrivants, il a dû faire face à une lourde chirurgie du cœur, pour cause de crise cardiaque. Durant les deux ans de convalescence qui suivent, il se forme et obtient son diplôme canadien en génie des matériaux. Le secteur du pétrole étant en berne en Alberta, il se consacre depuis lors à sa propre affaire avec beaucoup de détermination pour prendre place dans les cuisines albertines.